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table des matières de l'œuvre d'Aristote

 

table des matières de l'histoire des animaux

 

 

 

ARISTOTE

 

 

HISTOIRE DES ANIMAUX D'ARISTOTE

 

LIVRE PREMIER

 

relu et corrigé

préface

 

texte grec

 

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HISTOIRE DES ANIMAUX D'ARISTOTE

LIVRE PREMIER

CHAPITRE PREMIER Variétés infinies des animaux : dans les parties dont ils sont composés et qui se décomposent elles-mêmes en parties similaires et non similaires ; dans l'analogie des parties pour des genres différents; dans la dimension des parties; dans la nature de leurs parties, sèches, liquides, ou solides; dans leur genre de vie, selon qu'ils vivent sur terre ou dans l'eau; dans leur immobilité ou leur locomotion ; dans leur habitude de vivre en troupes ou solitaires; dans les sons qu'ils produisent, inarticulés ou articulés; dans leurs chants ou leur mutisme ; dans leur caractère ; privilège et supériorité de l'homme, doué de la réflexion et de la réminiscence.

§ 1. [486b] [5] Entre les parties dont les animaux sont formés, il y en a qui ne sont pas complexes; ce sont celles qui peuvent se diviser en parties similaires, comme les chairs, qui se divisent toujours en chairs ; il y en a d'autres, au contraire, qui sont complexes, comme toutes celles qui se divisent en parties non similaires; et telles sont, par exemple, la main, qui ne se divise pas en plusieurs mains; ou le visage, qui ne se divise pas non plus en plusieurs visages.

§ 2. De ces parties non composées, il en est qu'on n'appelle pas seulement des parties, mais qu'on appelle plus proprement des membres ; ce sont en général [10] les parties qui, formant un tout complet, renferment encore en elles d'autres parties distinctes. C'est ce qu'on peut voir pour la tête, pour la jambe, pour la main, pour le bras pris dans son ensemble, pour la poitrine, puisque chacune de ces parties composent un tout, et qu'en outre, elles contiennent en elles d'autres parties encore.

§ 3. Toutes les parties non similaires se composent à leur tour de parties similaires : la main, par exemple, est composée de chair, de nerfs et d'os.

§ 4. II y a [15] des animaux chez qui toutes les parties sont mutuellement semblables ; il en est aussi chez lesquels elles sont fort différentes. Les parties sont spécifiquement les mêmes, comme le nez et l'œil d'un homme sont de même espèce que le nez et l'œil d'un autre homme; comme sa chair est semblable à la chair; et ses os, aux os. On en peut dire autant des chevaux, ou de tels autres animaux que nous trouvons [20] d'espèce identique les uns aux autres; car la ressemblance qui se manifeste de l'animal entier à un autre animal entier, se reproduit également entre chacune de leurs parties, les unes relativement aux autres.

§ 5.  Toutefois ces parties, tout en étant pareilles dans tous les animaux d'un même genre, diffèrent néanmoins selon qu'elles sont plus grandes ou moins grandes. Quand je dis genre, j'entends par exemple, l'oiseau et le poisson. Ces deux êtres ont entre eux une différence de genre ; et chacun d'eux, dans leur genre particulier, ont encore d'autres différences, puisqu'il y a plusieurs espèces [25] de poissons et d'oiseaux.

§ 6. Dans ces genres mêmes, ce qui fait ordinairement les différences les plus sensibles entre presque toutes les parties, [5] outre les contrariétés de modifications dans la couleur et dans la forme, c'est que ces modifications affectent davantage certaines parties et qu'elles affectent moins les autres. C'est ainsi que ces différences se marquent par leur nombre plus grand ou plus petit, par les proportions de leur grandeur ou de leur petitesse, et en général par l'excès ou le défaut, c'est-à-dire le plus ou le moins.

§ 7. Il y a des animaux dont la chair est molle, d'autres dont la chair est dure ; [10] ceux-ci ont un long bec (comme les grues); chez ceux-là, le bec est court. Ici, le plumage est abondant; là, il est presque nul. Même dans certains genres, les parties sont différentes selon les espèces : ainsi, les uns ont des ergots, tandis que les autres n'en ont pas; les uns ont des crêtes, qui manquent aux autres. En un mot, ou la plupart des parties qui composent la masse entière [15] de l'animal peuvent être les mêmes ; ou elles peuvent différer par des qualités contraires, et des dimensions plus ou moins fortes. Le plus et le moins dans ces dimensions constitue ce qu'on peut appeler l'excès des unes et le défaut des autres.

§ 8. Dans quelques animaux, ce n'est pas l'identité des parties sous le rapport de l'espèce, ni l'identité selon le plus ou moins de grandeur, qu'il faut remarquer; c'est l'identité par simple analogie. Et, par exemple, l'os est analogue à l'arête, [20] l'ongle à la corne, la main à la pince, la plume à l'écaille, etc. ; car ce qu'est la plume dans l'oiseau, l'écaille l'est dans le poisson. Non seulement les parties dont se composent les animaux diffèrent entre elles, ou se ressemblent, comme on vient de le dire; mais elles se ressemblent encore ou diffèrent par leur position; car beaucoup d'animaux ont bien les mêmes parties, mais ces parties ne sont pas posées de même : par exemple, les mamelles sont placées [25] pour les uns sur la poitrine; pour les autres, elles sont placées entre les cuisses.

§ 9. Les parties similaires sont tantôt molles et liquides; tantôt, sèches et solides. Les parties liquides sont liquides d'une manière absolue, ou du moins tant qu'elles restent dans leur disposition naturelle; et tels sont le sang, la lymphe, la graisse, le suif, la moelle, le sperme, la bile, le lait, dans les animaux qui sécrètent ces matières, la chair et les [5] matières analogues. Dans une autre classe, on peut indiquer aussi les excrétions, telles que le phlegme, et tout ce que rejettent les intestins et la vessie. Les parties sèches et solides, ce sont, par exemple, les nerfs, la peau, les veines, les cheveux, les os, les cartilages, les ongles, les cornes. D'ailleurs, on se sert du même mot qui exprime la partie, quand, par sa forme, le tout doit être appelé aussi de la corne. Les parties molles et liquides, sèches et solides, sont encore tout ce qui correspond aux parties qu'on vient d'énumérer. [10]

§ 10. Les différences des animaux se montrent dans leur genre de vie, dans leurs actions, dans leur caractère, aussi bien que dans leurs parties. Traçons-en d'abord une esquisse générale; et plus tard, nous insisterons plus spécialement sur chaque genre. Les différences qui regardent la manière de vivre, [15] les actes et le caractère, tiennent à ce que les uns vivent dans l'eau ; et les autres, sur la terre.

§ 11. Parmi les animaux aquatiques, il y a deux espèces à distinguer. La première vit dans l'eau et s'y nourrit; elle absorbe le liquide et le rejette ; si elle vient à en manquer, elle ne peut plus vivre. C'est le cas de la plupart des poissons. La seconde espèce se nourrit aussi dans l'eau et y passe sa vie; [20] mais cependant elle ne respire pas l'eau; elle respire l'air et se reproduit hors du liquide.

§ 12. Bon nombre de ces derniers animaux sont pourvus de pieds, comme la loutre, le castor et le crocodile; ou aussi, pourvus d'ailes, comme la mouette et le plongeon. Quelques-uns se nourrissent également dans l'eau et ne peuvent vivre dehors ; [25] et pourtant, ils n'absorbent ni l'air, ni l'eau, comme l'ortie de mer et l'huître. Parmi les animaux aquatiques, les uns vivent dans la mer; les autres, dans les rivières; ceux-ci, dans les lacs; ceux-là, dans les mares, comme la grenouille et le cordyle. Les animaux marins habitent, tantôt la haute mer, tantôt les rivages et les rochers.

§ 13. Quant aux animaux terrestres, il y en a qui reçoivent l'air et le rejettent; c'est ce qu'on appelle aspirer et expirer; on observe ce phénomène dans [30] l'homme, et dans tous les animaux terrestres qui ont des poumons. D'autres au contraire n'absorbent pas l'air; mais ils vivent et trouvent leur nourriture sur le sol, comme la guêpe, l'abeille et les autres insectes. Par Insectes, j'entends tous les animaux qui ont des sections dans leur corps, que ces sections soient sous le ventre seulement, ou qu'elles soient à la fois sous le ventre et aussi sur le dos.

§ 14. Ainsi qu'on vient de le dire, [487b] un grand nombre d'animaux terrestres tirent leur nourriture de l'eau; mais pas un seul animal aquatique, ou absorbant l'eau de mer, ne trouve sur terre ses aliments. Quelques animaux en petit nombre vivent d'abord dans l'eau, et changent ensuite de forme pour vire dehors; telles sont les empis ou mouches de rivière, d'où naissent les taons.

§ 15. Il est des animaux qui restent toujours en place; il en est d'autres qui en changent. Ceux qui restent immobiles sont dans l'eau; mais pas un seul animal terrestre n'est immobile. Dans l'eau, il y en a beaucoup qui continuent à vivre là où ils naissent, comme bien des espèces de coquillages. Même il semble que l'éponge a une sorte de [10] sensibilité; et ce qui le prouverait, c'est qu'elle est plus difficile à détacher, à ce qu'on prétend, quand on ne sait pas dissimuler le mouvement par lequel on la saisit. Il y a même aussi des animaux aquatiques qui sont attachés et qui se détachent, comme certaine espèce de ce qu'on nomme les orties de mer, qui, dans la nuit, se détachent du rocher pour aller chercher leur pâture.

§ 16. Beaucoup qui sont détachés sont néanmoins immobiles, comme les huîtres et [15] ce qu'on appelle les holothuries. Certains animaux aquatiques nagent, comme les poissons, les mollusques, et ceux dont l'écaille est molle, ainsi qu'elle l'est dans les langoustes; certains autres ont la faculté de marcher, comme l'espèce des crabes, qui, tout en étant naturellement aquatiques, n'en marchent pas moins sur terre.

§ 17. Les animaux terrestres peuvent tantôt voler, comme les oiseaux et les abeilles, qui d'ailleurs diffèrent les uns des autres [20] à bien des égards; et tantôt, ils se meuvent sur terre, soit qu'ils marchent, soit qu'ils rampent, soit qu'ils se roulent. Aucun animal n'est simplement volatile, de même que le poisson n'est doué que de la faculté de nager. En effet, les animaux qui ont des ailes membraneuses peuvent aussi marcher; la chauve-souris a des pieds, de même que le phoque a également des pieds, quoique mal conformés. Il y a encore quelques oiseaux qui ont des pieds très mauvais, [25] et que, pour cette raison, on appelle apodes, ou sans pieds. Par contre, ce genre d'oiseaux vole à merveille; et toutes les espèces qui leur ressemblent ont en général des ailes excellentes et des pieds très faibles, comme l'hirondelle et le martinet.

§ 18. Du reste, tous ces oiseaux, ayant les mêmes allures et le même plumage, se rapprochent beaucoup d'aspect entre eux. L'apode se montre en toute saison, tandis que le martinet [30] ne se montre qu'en été, quand il pleut: c'est alors qu'on le voit et qu'on le prend. D'ailleurs, c'est un oiseau qu'on aperçoit rarement. Il y a beaucoup d'animaux qui ont à la fois les deux qualités de pouvoir marcher et de pouvoir nager.

§ 19. Des différences se présentent aussi dans le genre de vie des animaux et dans leurs actes. Ceux-ci vivent en troupe; [488b] ceux-là sont solitaires, soit qu'ils marchent sur terre, soit qu'ils volent ou qu'ils nagent; d'autres ont indifféremment les deux genres de vie. Ceux qui vivent en troupe, tantôt sont organisés en sociétés fixes, tantôt ils sont errants. Les animaux vivant en troupe sont, par exemple, dans les volatiles, le genre des colombes, la grue, le cygne, [5] etc. Ceux qui sont munis d'ongles crochus ne vivent jamais en troupe.

§ 20. Parmi les poissons qui vivent en pleine mer, il y en a un bon nombre qui vivent en troupe, comme les dromades, les thons, les pélamydes, les amies ou bonitons. L'homme vit également des deux façons, ou en troupe, ou solitaire. Les animaux qui forment des sociétés sont ceux qui ont à faire un travail identique et commun; mais tous les animaux vivant en troupes ne forment pas des sociétés dans ce but. Au contraire, l'homme, l'abeille, [10] la guêpe, la fourmi, la grue forment des sociétés de ce genre; et de ces sociétés, les unes ont un chef, tandis que les autres n'en ont pas. Ainsi, la grue et l'espèce des abeilles ont un chef, tandis que les fourmis et tant d'autres n'en ont pas.

§ 21. Les animaux vivant en troupe et les solitaires, tantôt restent dans les mêmes lieux, et tantôt ils en changent. Les uns sont carnivores, [15] les autres frugivores; les uns mangent de tout ; les autres ont une pâture toute spéciale, comme les abeilles et les araignées. Les abeilles font leur nourriture du miel, et de quelques autres matières aussi douces; les araignées vivent des mouches qu'elles chassent.

§ 22. II y a des animaux qui se nourrissent de poissons. Il y en a qui sont chasseurs; [20] d'autres font provision d'aliments; d'autres n'ont pas ce soin. Les uns ont des demeures; d'autres n'en ont pas. Ainsi la taupe, le rat, la fourmi, l'abeille en ont; mais la plupart des insectes et des quadrupèdes s'en passent. Ceux-ci, comme le lézard et le serpent, vivent dans des trous; ceux-là, comme le cheval et le chien sont toujours à la surface de la terre. Les uns [25] se creusent des tanières; les autres ne s'en font pas. Les uns vivent toujours dans les ténèbres, comme la chouette et la chauve-souris; les autres, à la clarté du jour.

§ 23. De plus, tels animaux sont privés; tels autres sont sauvages. Les uns sont toujours privés, comme l'homme et le mulet; d'autres restent toujours sauvages, comme la panthère et le loup; d'autres encore sont susceptibles de s'apprivoiser très vite comme l'éléphant. A un autre point de vue, [30] toutes les espèces qui sont privées peuvent être sauvages aussi, comme les chevaux, les bœufs, les cochons, les moutons, les chèvres et les chiens.

§ 24. II y a des animaux qui émettent des sons; d'autres sont muets. Parmi ceux qui ont une voix, les uns l'articulent; les autres produisent des bruits que les lettres ne peuvent représenter. Ceux-ci sont bavards; ceux-là sont silencieux; ceux-ci ont un chant; ceux-là n'en ont pas; mais une qualité commune à tous, [489a] c'est qu'ils chantent ou jasent bien davantage au temps de l'accouplement. Les uns se plaisent dans les champs, comme le ramier; d'autres, sur les montagnes, comme la huppe; d'autres vivent familièrement avec l'homme, comme le pigeon. Les uns sont lascifs, comme les perdrix et les coqs ; [5] les autres sont plus retenus, comme le corbeau et les espèces analogues, qui ne s'accouplent que de loin à loin. Parmi les animaux marins, les uns vivent en haute mer; les autres, sur les bords; d'autres, dans les rochers. Certains animaux se défendent et attaquent; certains autres se bornent à se garder; les animaux qui attaquent sont ceux qui dressent des pièges et qui se défendent quand ils sont attaqués; ceux qui se gardent [10] sont ceux qui ont en eux-mêmes un instinct qui les avertit du mal qui les menace.

§ 25. Le caractère des animaux n'offre pas moins de différences. Les uns sont doux et ne s'irritent presque jamais ; ils ne résistent pas ; tel est le bœuf. D'autres, au contraire, sont enclins à la fureur, à la résistance ; et l'on ne peut rien leur apprendre; tel est le sanglier. [15] Ceux-ci sont prudents et craintifs, comme le cerf et le lièvre; ceux-là sont vils et traîtres, comme les serpents. D'autres sont nobles, courageux et fiers, comme le lion. D'autres sont franchement féroces et rusés, comme le loup. J'entends par noble, en parlant d'un animal, celui qui sort d'une race bien douée; et j'entends par franc celui qui n'a rien perdu de la nature [20] qui lui est propre.

§ 26. Tel animal est plein d'activité et de malice, comme le renard ; tel autre, comme le chien, est plein de cœur, d'attachement et de fidélité. D'autres sont doux et faciles à apprivoiser, comme l'éléphant; d'autres, comme l'oie, sont timides et de bonne garde. D'autres sont jaloux et vaniteux, comme le paon. Entre tous les animaux, l'homme [25] seul a le privilège de la réflexion. Beaucoup d'animaux autres que lui ont également la faculté de se souvenir et d'apprendre; mais l'homme seul a le don de se ressouvenir à volonté.

§ 27. Nous reviendrons plus tard avec plus de précision encore sur ce qui regarde les diverses espèces d'animaux, et aussi sur le caractère et la façon de vivre de chacune de ces espèces.

Ch. 1. Ce début paraît un peu brusque; et des commentateurs ont proposé de regarder le premier livre du Traité des Parties des Animaux comme le préambule nécessaire de l'Histoire des Animaux. Cette opinion n'est pas acceptable, puisqu'alors le Traité des Parties des Animaux serait à son tour décapité. Patrizzi croyait que l'Histoire des Animaux faisait suite au Traité des Parties. C'est le contraire qui est vrai. Voir l'Aristote de M. Lewes, p.279. Les grands naturalistes, Buffon, Cuvier, ont commencé leurs ouvrages en exposant la méthode qu'ils comptaient suivre. Aristote n'expose pas ici la sienne, bien qu'il n'ait pas tout à fait omis ce soin, même dans l'Histoire des Animaux. Voir plus loin chap. VI, §§ 10 et 11. Mais sa méthode d'histoire naturelle est exposée surtout dans le traité des Parties des Animaux, où elle remplit tout le premier livre. Le lecteur voudra bien se reporter à cet autre ouvrage.

§ 1. Qui ne sont pas complexes... qui sont complexes. Cette division, aussi profonde que simple, est encore usitée dans la science; et, sous des formes un peu différentes, on la retrouve dans presque tous les traités contemporains de quelque importance. Les Parties similaires répondent à l'anatomie générale; et les Parties non similaires, à l'anatomie descriptive. Voir l'Introduction de MM. Aubert et Wimmer, t. 1, p. 36. - Comme les chairs. Peut-être eût-il mieux valu prendre le singulier; mais j'ai suivi le texte fidèlement. - La main, qui ne se divise pas en mains. L'exemple est aussi clair que possible; et il explique parfaitement ce qui précède. Sur le rapport des parties similaires et non similaires, voir le Traité des Parties des Animaux, liv. II, ch. I et II.

§ 2. Des membres. C'est la traduction exacte; on aurait peut-être pu encore traduire : des organes. Voir plus loin, ch. VI, § 12. - Pour le bras pris dans son ensemble. C'est-à-dire comprenant le haut du bras, l'avant-bras et la main, sous le nom générique de bras. - Pour la poitrine, ou le thorax. La poitrine contient, en effet, dans sa totalité, une foule de parties diverses.

§ 3. Se composent à leur tour de parties similaires. Les parties similaires ne se ressemblent pas parfaitement entre elles; et la chair, par exemple, contient une foule de variétés qu'il est facile de distinguer, bien que toutes ces variétés soient comprises sous un nom commun. - De nerfs, de muscles. Il n'y a qu'un seul mot dans le texte; mais ce mot signifie également Nerfs et Muscles.

§ 4. Spécifiquement les mêmes. Au lieu de «spécifiquement », on pourrait traduire aussi : « Sous le rapport de la forme ». Dans la langue grecque, le même mot exprime l'espèce et la forme; et au fond, l'espèce, comme l'étymologie elle-même l'indique en latin aussi bien qu'en grec, n'est que la forme qui frappe notre vue, et qui, pour notre intelligence, classifie immédiatement l'être qui nous offre cette forme. - Les unes relativement aux autres. On peut comprendre encore : « De chaque animal relativement aux parties de chaque autre animal ». C'est en ce dernier sens que quelques traducteurs ont rendu ce passage. L'interprétation que je donne me semble plus naturelle, et plus conforme au texte.

§ 5. D'un même genre. Comme l'homme ou le cheval, cités au paragraphe précédent. - Quand je dis genre. Cette définition du mot genre, bien qu'elle soit fort juste et qu'elle soit nécessaire, ne paraît pas ici fort bien à sa place. C'est peut-être une interpolation de quelque scholiaste plutôt qu'une addition de l'auteur lui-même. - L'oiseau et le poisson. Ce sont bien des genres, si l'on veut; mais il semble qu'ici il faudrait une expression encore plus étendue que celle de genre; par exemple, celles de classe ou d'ordre. Le mot de genre est un peu vague, parce qu'alors il comprend trop de choses très distinctes. - Plusieurs espèces. Ce sont en effet les espèces, dont l'ensemble forme un genre.

§ 6. Dans ces genres mêmes. Le texte est moins précis, et il se sert d'un pronom indéfini qui pourrait se rapporter aussi aux oiseaux; mais le sens n'est guère douteux. - Les Contrariétés, ou les Oppositions. - C'est-à-dire le plus ou le moins. J'ai ajouté ces mots, qui ne sont qu'une paraphrase de ceux qui précèdent. - Tout ce paragraphe pourrait n'être appliqué qu'aux oiseaux, comme le pensent MM. Aubert et Wimmer; je crois qu'il est préférable de le rapporter aux genres plutôt qu'aux oiseaux; par là l'observation a beaucoup plus d'étendue, et elle n'a pas moins de justesse.

§ 7. Dont la chair est molle. J'ai adopté la leçon de MM. Aubert et Wimmer. Quelques manuscrits donnent deux variantes qui seraient également acceptables : «dont la peau est molle »; dont «l'écaille est molle ». L'idée de chair est préférable, parce qu'elle est plus générale. - Comme les grues. J'ai mis ces mots entre parenthèses, parce que tous les manuscrits ne les donnent pas, et qu'ils peuvent sembler une interpolation peu nécessaire. Il est à remarquer que tout ce paragraphe, sauf le début, se rapporte aux oiseaux, le bec, le plumage, les ergots, etc. ; voir la note du paragraphe précédent. - Dans certains genres. La suite prouve que ceci est exclusivement applicable aux oiseaux. - En un mot. Il semble que cette fin du paragraphe est plus générale, et qu'elle est relative à tous les animaux, et non plus aux oiseaux seulement. Il y a dans tout ce passage un peu d'obscurité, que j'ai dû conserver dans la traduction. - Par des qualités contraires... C'est en partie une répétition du § 6.

§ 8. L'identité. Le mot est peut-être un peu fort, et il vaudrait mieux dire : « La ressemblance ». - L'identité par simple analogie. Ceci fait bien ressortir l'impropriété de l'expression. L'analogie n'est que de la ressemblance, même assez éloignée: ce n'est pas de l'identité. Les idées d'ailleurs n'en sont pas moins très vraies. - A la pince. Dans certaines espèces de crustacés, si l'on veut. - Par leur position. La remarque est fort exacte, et la position à elle seule peut faire une très grande différence. - Pour les uns sur la poitrine, comme dans l'espèce humaine. - Entre les cuisses, comme plusieurs espèces de bêtes à cornes : le bœuf, le mouton, la chèvre, etc.

§ 9. Les parties similaires. Voir plus haut, § 1. - Dans leur disposition naturelle. Quelques traducteurs précisent davantage le sens en disant : « Dans le corps vivant ». Le texte est un peu plus vague; et je l'ai suivi d'aussi près que je l'ai pu. - Le phlegme. Une des quatre humeurs principales du corps humain, selon les anciens, qui faisaient venir le phlegme surtout de la tête. Voir Hippocrate, Traité des Maladies, liv. IV, p. 514, édition Littré. Le phlegme répond en partie à ce qu'on appelle aujourd'hui sérosité, pituite. - Les nerfs, ou  plutôt: « les muscles », voir plus haut, § 3. - D'ailleurs. Cette idée n'est pas rendue plus clairement dans le texte que dans la traduction ; ce n'est peut-être qu'une glose; et ceci veut dire sans doute qu'une corne, entière, comme celle d'un bœuf par exemple, s'appelle corne, tout aussi bien que la portion la plus petite de cette corne raclée. - Les parties molles et liquides... Le texte n'est pas aussi explicite.

§ 10. Dans leur genre de vie, etc. Ce sera là l'objet des livres suivants et de toute l'Histoire des Animaux, comme l'indique l'auteur lui-même dans la phrase qui suit. - Leur caractère. On pourrait traduire aussi : « Leurs habitudes ». Caractère et habitudes se confondent pour les animaux; car ce sont leurs habitudes qui déterminent le caractère que nous leur prêtons. - Une esquisse générale. C'est la méthode que pratique toujours Aristote; il commence par une vue très générale du sujet qu'il veut traiter, et il passe ensuite aux détails. - Et le caractère. Même remarque que plus haut.

§ 11. La première. Ce sont les poissons en général. - La seconde espèce. Ce sont en grande partie ceux des oiseaux qui virent sur l'eau, et qui y trouvent leur nourriture, tout en étant le plus souvent sur la terre.

§ 12. La loutre. II paraît bien que c'est ainsi que doit être identifié le mot grec; mais il est probable qu'il s'agit ici de la loutre de mer, à laquelle les naturalistes ont conservé le nom spécial qu'Aristote lui donne dans ce passage. Les loutres ont des pieds palmés, et sont comprises parmi les digitigrades carnassiers de Cuvier, Règne animal, t. I, p. 148, édition de 1829. Le castor. D'après le témoignage de Strabon, le castor se trouvait encore de son temps en Espagne, et en Italie, près de l'embouchure du Pô. Du temps d'Aristote, ces animaux, qui disparaissent devant l'homme, devaient être plus nombreux qu'au siècle de Strabon: et peut-être s'en trouvait-il alors dans quelques parties de la Grèce. Il y en a même encore aujourd'hui quelques-uns en Europe, et notamment, dit-on, en Suisse. Voir plus loin, liv. VIII, ch. VII, § 5, en ce qui concerne la loutre et le castor; pour les animaux aquatiques en général, voir aussi le Livre VIII, ch. II et ch. III. - Crocodile. Voir plus loin, ch. IX, s 11; voir aussi la Table des matières, article Crocodile. Aristote est revenu souvent à l'étude de cet animal. qui offre en effet des particularités très remarquables. - L'ortie de mer. Voir plus bas, 15, liv. IV, ch. VI, une description des deux espèces d'orties de mer. - L'huître. Les huîtres sont comprises parmi les mollusques crustacés, dont elles forment la première classe; voir Cuvier, Règne animal, t. III p. 120. - La grenouille. Cuvier, Règne animal, t. II, p. 103, met la grenouille parmi les reptiles; elle en forme le quatrième ordre sous le nom de Batraciens. Cuvier décrit la manière dont la grenouille respire. Voir aussi le Traité de Zoologie de M. le Dr. Claus, trad. française de M. Moquin-Tandon, p. 879. La grenouille est un amphibie. - Le cordyle. On n'est. pas encore parvenu à identifier bien précisément le mot grec. Cuvler, Règne animal, t. Il, p. 32, cite un passage d'Aristote sur le cordyle; il croit avec Schneider que la description d'Aristote ne peut convenir qu'à la larve de la Salamandre aquatique. Voir plus loin, liv. Vlll, ch. II, §, 8.

§ 13. N'absorbent pas l'air. Aristote se trompe en ceci, et les insectes absorbent l'air par les trachées dont tout leur corps est couvert. Voir Cuvier, Règne animal, t. IV, p. 293. Voir aussi la 1ère leçon de son Anatomie comparée. 2e édit. - La guêpe. Voir plus loin la description de la guêpe, liv. IX, ch. XXVIII. - L'abeille. Voir plus loin une admirable et longue étude sur les abeilles, liv. IX, ch. XXVII. - Par Insectes, j'entends... Voir plus loin une même définition des insectes, liv. IV, ch. I.

§ 14. Empis. MM. Aubert et Wimmer croient que l'empis pourrait bien être le Culex pipiens de Swammerdam. Voir Cuvier, Règne animal, tome V, p.159: voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 604. L'empis est classé parmi les insectes diptères. - D'où naissent les taons. MM. Aubert et Wimmer supposent que cette phrase n'est qu'une interpolation; et leur conjecture peut sembler acceptable. Voir plus loin, liv. V, ch. XVII, § 11.

§ 15. Qui restent toujours en place. Nouveau caractère, qui met de grandes différences entre les animaux. - Ceux qui restent immobiles sont dans l'eau. Remarque fort juste, qui n'a été, à ce qu'il semble, recueillie par aucun naturaliste après Aristote. - L'éponge. Cette demi-sensibilité dans l'éponge n'est pas admise par les naturalistes modernes; Cuvier, Règne animal, tome V, p. 322. Aristote lui-même semble en douter, puisqu'il ne rapporte ce fait que comme un on dit : «- A ce qu'on prétend ». Il paraît que les plongeurs ont plus ou moins de peine à arracher les éponges des rochers où elles s 'attachent; et ils supposent que, quand elles tiennent davantage, c'est qu'on ne s'est pas approché d'elles avec assez de précaution. Voir la note de MM. Aubert et Wimmer. - Les orties de mer. Voir plus haut, § 12. Voir aussi Cuvier. Règne animal, tome III, p. 274. Les Acalèphes forment la troisième classe des Zoophytes. - Pour aller chercher leur pâture. Je ne sais pas si la science moderne a constaté ce fait; je n'ai rien trouvé sur ce sujet dans les ouvrages que j'ai pu consulter.

§ 16. Les holothuries. Les holothuries sont des zoophytes, et forment la première classe des échinodermes pédicellés; voir Cuvier, Règne animal, tome III, p. 238; voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 263, 268. - Dont l'écaille est molle. Les langoustes, qui sont citées en exemple, ont une écaille assez dure, bien quelle le soit moins que celle des homards. - Des crabes. C'est ce qu'on peut voir très fréquemment dans les rochers que la mer laisse à sec lors de son reflux sur un grand nombre de côtes.

§ 17. Aucun animal n'est simplement volatile. Observation très sagace. - Des ailes membraneuses. Comme la chauve-souris, citée un peu plus bas. - La chauve-souris. Elle fait partie du troisième ordre des Mammifères carnassiers, première famille de Chiroptères; voir Cuvier, Règne animal, tome I. p. 112. Cuvier remarque aussi que les pieds de derrière des chauves-souris sont faibles ; Traité de Zoologie de M. Claus, p. 1079, Chiroptères. - De même que le phoque. On ne comprend pas bien comment on arrive ici à parler du phoque; MM. Aubert et Wimmer pensent que cette phrase est une interpolation. Pour le Phoque, voir plus loin, liv. Il, ch. II, § 11. - Apodes. Ce mot a été conservé par la science moderne et appliqué à plusieurs espèces d'animaux, notamment à des amphibies; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 870. - Ce genre d'oiseaux. Les chauves-souris et leurs analogues. - Vole à merveille. Cuvier fait la même remarque, loc. cit. - Le martinet. C'est, je crois, le seul passage où Aristote parle de cet oiseau.

§ 18. Du reste... Cette observation ne paraît pas être bien à sa place ici. - L'apode. Il semble que ce soit le nom d'un oiseau et d'une espèce d'hirondelle; mais il serait difficile d'indiquer précisément l'espèce dont Aristote entend parler. Tout ce passage interrompt la pensée; et c'est avec raison que MM. Aubert et Wimmer l'ont mis entre crochets. - Il y a beaucoup d'animaux. Les pensées reprennent ici leur suite.

§ 19. Dans le genre de vie. Plus loin, liv. VIII et IX, cette étude spéciale est très développée. - Virent en troupe... solitaires. C'est un caractère très important dans la vie des animaux; et cette observation générale est ici bien placée. Schneider, et après lui MM. Aubert et Wimmer, ont supprimé quelques mots qui paraissent en effet hors de place et qui indiquent « des animaux solitaires ». - En sociétés fixes. Le mot dont se sert le texte grec est plus fort que celui de ma traduction. - Munis d'ongles crochus. Ce sont les oiseaux de proie, qui vivent toujours solitaires, bien que parfois ils se réunissent par bandes, comme les vautours, momentanément. J'ai préféré traduire mot à mot le texte grec en disant «à ongles crochus » plutôt qu'Oiseaux de proie, comme l'ont fait plusieurs traducteurs.

§ 20. Les dromades. Aristote cite encore une fois les dromades, liv. VI, ch. XVI, § 5. Il serait difficile d'identifier cet animal; c'est un poisson, et son nom semble indiquer que sa qualité la plus remarquable était de nager très vite. En grec, dromas veut dire coureur. - Les Pélamydes. Espèce de thons qui se trouve aussi dans la Méditerranée; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 853. Pélamydes est encore le nom donne à des ophidiens; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 97. - Les amies. Je ne sais pas si le poisson dont parle ici Aristote est le même que celui dont parle Cuvier, Règne animal, tome II, p. 321, et qui semble n'appartenir qu'aux rivières de la Caroline en Amérique; voir aussi le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 827. - Bonitons. J'ai ajouté ce synonyme, que donne Camus. Voir plus loin, liv. VI, ch. XVI, § 11. - L'homme... ou solitaire. Ceci n'est pas d'accord avec ce qu'Aristote dit de l'homme dans la Politique, où il le fait un être essentiellement sociable ; voir la Politique, liv. I, ch. I, § 9, p.7 de ma traduction. 3e édit. - L'homme, l'abeille, la guêpe. Il est assez étrange de confondre l'homme avec les autres animaux, bien que ce soit pour un point très défini de ressemblance. - Les unes ont un chef. On ne peut assimiler les chefs des hommes aux chefs des abeilles et des guêpes. - Et tant d'autres. MM. Aubert et Wimmer suppriment ces mots.

§ 21. Et les solitaires. Voir plus haut, § 19. - Tantôt ils en changent. Aristote a consacré une longue étude aux migrations des animaux ; voir plus loin, liv. Vlll, ch. xiv. - Les abeilles et les araignées. Sur les abeilles et les araignées, voir liv. IX, ch. XXVI et ch. XXVII; et Traité de la Génération des animaux, liv. III. ch. X. - Quelques. MM. Aubert et Wimmer retranchent ce mot, bien que presque tous les manuscrits et les éditions le donnent.

§ 22. Font provision. Le texte dit mot à mot : «Thésaurisent. » - La fourmi. Quelques manuscrits ajoutent : La mouche, après la fourmi. - Et la chauve-souris. Le nom grec de la chauve-souris indique précisément que c'est un oiseau de nuit par excellence. Notre mot de chauve-souris est beaucoup moins bien fait.

§ 23. L'homme et le mulet. Cette réunion de l'homme et du mulet a quelque chose d'étrange, quoiqu'elle ne soit pas fausse. - Comme les chevaux. Quelques manuscrits ajoutent de plus : « Les hommes ». L'édition des Aldes et la traduction de Gaza ont aussi cette addition, que la plupart des éditeurs ont bien fait de supprimer.

§ 24. Qui émettent des sons. J'ai dû prendre l'expression la plus générale possible. - Que les lettres ne peuvent représenter. J'ai dû développer un peu le texte grec, qui n'a ici qu'un seul mot. Sur la voix des animaux et ses nuances, voir plus loin, liv. IV, ch. IX. - Au temps de l'accouplement. L'observation est très exacte; et chacun de nous a pu la faire. - Vivent familièrement avec l'homme. Le texte grec n'a qu'un seul mot, qui est très bien fait. - Parmi les animaux marins dans les rochers. Cette pensée, qui est déjà plus haut, § 12, semble ici hors de place; et elle ne se rapporte bien, ni à ce qui la précède, ni à ce qui la suit. C'est là sans doute ce qui aura porté quelques éditeurs à la supprimer; mais les manuscrits. ne le permettent pas. - Se défendent et attaquent. Il n'y a dans le texte qu'un seul mot, qui me paraît avoir ces deux sens. - Un instinct. Le texte n'est pas aussi positif.

§ 25 Le caractère. Plus loin, deux livres presque entiers, le Vlll et le IXe, sont consacrés à étudier le caractère des divers animaux. - J'entends par Noble... j'entends par Franc. Ces définitions sont peut-être un peu subtiles, bien que ces différences dans les qualités et le caractère des animaux soient très réelles.

§ 26. Le privilège de la réflexion. Il faut voir au début de la Métaphysique la comparaison de l'homme avec les autres animaux. - A volonté. J'ai ajouté ces mots, dont le sens me semble implicitement compris dans l'expression du texte grec. MM. Aubert et Wimmer entendent ce mot un peu autrement; et ils croient qu'il s'agit de la mémoire appliquée exclusivement au passé. Je pense qu'Aristote veut distinguer ici entre la mémoire et la réminiscence, comme il l'a fait dans son traité spécial. Voir ma traduction, Opuscules psychologiques, p. 109.

CHAPITRE II Parties communes à tous les animaux : l'une pour prendre la nourriture, l'autre pour en rejeter l'excrétion; La bouche, l'intestin; rapports de la vessie pour l'excrétion liquide, et de l'intestin pour l'excrétion sèche; organes génitaux.

§ 1. Tous les animaux ont certaines parties qui leur sont communes : celle par où ils prennent [30] leur nourriture, et celle où ils la reçoivent. Ces parties se ressemblent ou diffèrent entre elles, selon ce qu'on a déjà exposé, par la forme, par la dimension, par l'analogie et par la position. Mais outre ces parties que nous venons d'indiquer, la plupart des animaux ont aussi d'autres parties communes, qui leur servent à rejeter le résidu de la nourriture. [489b] Je dis La plupart, parce que tous n'ont pas cet organe. La partie qui sert à prendre la nourriture s'appelle la bouche: celle qui sert à la recevoir s'appelle l'intestin. Les autres parties ont des dénominations diverses.

§ 2. Le résidu excrété étant de deux natures, les animaux qui ont des organes destinés à recevoir l'excrétion liquide, en ont également pour l'excrétion sèche; [5] mais tous les animaux qui ont cette dernière n'ont pas l'autre excrétion. Ainsi, tous les animaux qui ont une vessie ont tous un intestin; mais ceux qui ont un intestin n'ont pas tous une vessie. Du reste, le nom de vessie s'applique à la partie qui reçoit l'excrétion liquide, et le nom d'Intestin, à la partie qui reçoit l'excrétion sèche.

§ 3. Outre ces parties que possèdent beaucoup d'animaux, il y a la partie par laquelle ils émettent leur semence. [10] Parmi ceux qui ont la faculté de se reproduire, on distingue l'animal qui fait l'émission en lui-même, et celui qui la fait dans un autre. Celui qui la fait en lui-même s'appelle femelle; celui qui la fait dans un autre s'appelle mâle. Dans quelques espèces, il n'y a ni mâle ni femelle; et la forme des organes chargés de cette fonction diffère d'une espèce à l'autre. Certaines espèces ont une matrice; d'autres n'en ont pas.

§ 4. Les parties qu'on vient d'énumérer sont les plus nécessaires; aussi, elles se trouvent les unes dans tous les animaux, et les autres, au moins dans la plupart.

§ 1. Par où ils prennent leur nourriture. C'est la bouche et les organes correspondants, selon les diverses espèces d'animaux.  - Celle où ils la reçoivent. C'est l'estomac et les organes correspondants. L'auteur explique lui-même un peu plus bas ce que sont ces premières parties communes à tous les animaux, la bouche et l'intestin. - Ce qu'on a déjà exposé. Voir plus haut, ch.I, §§ 5 et suivants. - Ces parties que nous venons d'indiquer. La bouche et l'estomac. - Le résidu de la nourriture. Les excréments sous toutes les formes. Après ces mots, les manuscrits ajoutent: « et à la prendre » Schneider a proposé de retrancher cette addition, qui est en effet hors de place; et MM. Aubert et Wimmer l'ont supprimée dans leur texte; la correction est de toute évidence, et je l'ai adoptée. - Je dis la plupart. Le texte n'est pas tout à fait aussi précis. - L'intestin. J'ai pris ce mot, parce qu'il exprime une idée plus générale que celui d'estomac, ou même celui de ventre. D'après l'étymologie, le mot grec signifie le creux. - Les autres parties. Ainsi Aristote distingue ici trois parties : la bouche, l'intestin et la partie excrétoire. Dans le Traité des Parties des Animaux, liv. Il, ch. X, §, 1 il n'en distingue que deux, la bouche et la partie excrétoire. L'ouverture buccale et l'ouverture anale se retrouvent, comme indispensables, chez les animalcules les moins formés, les protozoaires, comme les appellent les naturalistes modernes.

§ 2. L'excrétion liquide. L'urine, selon ses diverses formes. - Un intestin. Dans le texte, c'est le même mot que celui qui signifie l'estomac ou le ventre. La distinction que fait ici Aristote est réelle; et il y a des animaux qui ont un organe pour l'excrétion sèche, sans en avoir un pour l'excrétion liquide; mais les naturalistes ne sont pas d'accord sur ces animaux, qui occupent en général les plus bas degrés de l'échelle.

§ 3. Ils émettent leur semence. L'expression grecque peut signifier tout à la fois la semence et le résultat qu'elle produit, c'est-à-dire le jeune être qui vient de l'accouplement; mais il me semble que la suite prouve bien qu'il s'agit de semence, dans l'acception ordinaire de ce mot. - Qui fait rémission en lui-même. Ceci ne peut se rapporter qu'à l'idée de Semence, entendue comme je viens de le faire. - S'appelle femelle. C'est ce qu'on voit dans les animaux supérieurs, où les deux sexes sont parfaitement distincts, et spécialement dans l'homme. - Dans quelques espèces. Aujourd'hui on pourrait dire sans doute : « Dans beaucoup d'espèces »; mais au temps d'Aristote, les espèces inférieures, où l'hermaphrodisme est le cas le plus ordinaire, étaient beaucoup moins connues qu'aujourd'hui.

§ 4. Qu'on vient d'énumérer. La bouche, l'intestin avec vessie ou sans vessie, et les partiel de la génération.

CHAPITRE III Le toucher est le seul sens qui soit commun à tous les animaux; tout animal a un fluide indispensable à son existence; parties où se trouve le sens du toucher et où se trouvent les facultés actives; animaux qui ont du sang; animaux qui n'en ont pas.

§ 1. Un seul et unique sens est commun à tous les animaux sans exception : c'est le toucher. L'organe dans lequel ce sens réside naturellement, n'a pas reçu de nom spécial, parce que, dans les uns, l'organe est identique, et que, dans les autres, c'est une partie simplement analogue.

§ 2. [20] Pareillement, tout animal sans exception a un fluide dont il ne peut être privé, soit naturellement, soit par violence, sans périr sur-le-champ; et il y a de plus la partie où ce fluide est renfermé. Chez les uns, la partie liquide est le sang, et le vaisseau est la veine; chez d'autres, c'est un fluide et un vaisseau équivalents. Lorsque ces matières sont imparfaites, c'est ce qu'on appelle la fibre et la lymphe.

§ 3. Quant au sens du toucher, il est placé dans une partie similaire, par exemple, dans la chair, ou dans quelque chose [25] qui la remplace. En général, chez les animaux qui ont du sang, le toucher est dans les parties sanguines ; et pour ceux qui n'en ont pas, dans la partie correspondante. Si pour tous les animaux, le toucher réside évidemment dans les parties similaires, les facultés actives résident dans les parties non-similaires; et, par exemple, l'élaboration des aliments a lieu dans la bouche; la fonction du mouvement pour changer de lieu se fait par les pieds, par les ailes, et par les organes qui y correspondent. [30] Il faut ajouter que certains animaux ont du sang, tels que les hommes, les chevaux et tous les animaux, qui, bien que d'une organisation complète, ou n'ont pas de pieds, ou en ont deux, ou en ont quatre. Au contraire, d'autres animaux, tels que l'abeille ou la guêpe, n'ont pas de sang; et parmi les animaux marins, tels sont la seiche et le crabe, et tous ceux qui ont plus de quatre pieds.

§ 1. C'est le toucher. Aristote fait du toucher dans les animaux le sens de la nutrition; et voilà pourquoi il est indispensable à tous; voir le Traité de l'âme, liv. Il, ch. II, §§ 5 et 11, et ch. III, § 3, pp. 174, 177 et 182 de ma traduction. Voir aussi Cuvier, 1ère Leçon d'anatomie comparée, 2e édit. - N'a pas reçu de nom spécial. Précisément parce que le toucher n'est pas localisé, et qu'il est répandu dans le corps entier.

§ 2. La partie où ce fluide est renfermé. Le texte grec n'est pas aussi précis. - Chez les uns... J'ai adopté en partie la leçon ordinaire, et en partie la correction de MM. Aubert et Wimmer. De cette façon, le sens de ce passage est absolument satisfaisant. - Équivalents, ou Analogues. - La fière et la lymphe. - Les mots du texte sont peut-être plus vagues; et il serait difficile d'en bien préciser le sens.

§ 3. Une partie similaire. Voir plus haut, ch. I, § 1. - Dans les parties sanguines. La physiologie contemporaine n'accepte peut-être pas cette opinion.

§ 4. Dans la bouche. La bouche n'est pas une partie similaire, puisqu'elle ne peut pas se diviser en bouches; voir plus haut, ch. I, § 1.

§ 5. L'abeille et la guêpe n'ont pas de sang. La physiologie moderne n'admet pas cette théorie, et elle distingue les animaux à sang rouge et les animaux à sang blanc ou incolore; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 545.

CHAPITRE IV Distinction des animaux en vivipares, ovipares et vermipares; les animaux à poils sont vivipares; définition de l'œuf et de la larve; variétés dans les vivipares; variétés dans la nature des œufs; annonce de recherches plus détaillées; citation du Traité de la Génération des Animaux.

§ 1. Les animaux sont vivipares, ovipares ou vermipares. L'homme, le cheval, [490a] le phoque et tous les animaux qui ont des poils, sont vivipares. Parmi les animaux marins, les cétacés, tels que le dauphin et les sélaciens ainsi appelés, sont vivipares également.

§ 2.  De ces animaux marins, les uns ont le tuyau-souffleur et n'ont pas de branchies, comme le dauphin et la baleine. Le dauphin a le tuyau sur le dos, tandis que la [5] baleine l'a sur le front. D'autres ont des branchies apparentes, comme les sélaciens, les chiens de mer et les Batos.

§ 3. Parmi les germes qui sont complets, on appelle œuf ce qui contient deux parties : l'une qui sert d'abord à former l'animal, et l'autre où il trouve sa nourriture, une fois qu'il est produit. C'est un ver, lorsque, d'un animal complet, sort un autre animal également complet, l'embryon s'articulant et [10] se développant lui-même.

§ 4. Parmi les vivipares, il y en a qui font des œufs à l'intérieur d'eux-mêmes, comme les sélaciens; d'autres, comme l'homme et le cheval, font dans leur propre sein de petits animaux.

§ 5. Pour certains animaux, quand le germe qui s'est complètement formé se produit au jour, c'est un être vivant qui en sort; pour d'autres, c'est un œuf; pour d'autres, c'est un ver.

§ 6. Tantôt les œufs ont une enveloppe de coquille, comme ceux [15] des oiseaux, et ils sont de deux couleurs; tantôt leur enveloppe est molle, comme ceux des sélaciens, et ils n'ont qu'une couleur unique.

§ 7.  Quant aux vers, les uns se meuvent aussitôt après leur naissance ; les autres sont immobiles.

§ 8. Mais ce sont là des sujets que nous traiterons avec plus de détails, quand nous nous occuperons de la Génération des Animaux.  

§ 1. Vermipares. Ce sont les insectes; Aristote leur attribue de se reproduire sous forme de vers. Peut-être aussi veut-il parler des larves; mais ce point reste obscur. - Les Sélaciens. Ce sont des poissons cartilagineux à branchies fixes, attachées à la peau par leur bord extérieur. Ils forment le deuxième ordre des Chondroptérygiens; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 383 et suiv. Parmi les Sélaciens, sont compris les squales, les requins, les marteaux, les raies, les torpilles, indépendamment d'autres espèces; voir aussi le Traité de Zoologie de M. Claus, pp. 812 et 814. - Ainsi appelés. II paraîtrait que du temps d'Aristote, cette classe d'animaux était encore peu connue. D'après un passage de Pline, liv. IX, ch. XI., édit. Littré, il paraîtrait que c'est Aristote qui a inventé le mot de Sélaciens.

§ 2. Le tuyau-souffleur. Ou évent. Ces cétacés se nomment aussi des souffleurs. Ils forment la seconde famille des cétacés dans la nomenclature de Cuvier, Règne animal, tome I, p. 287. Elle comprend aussi les narvals, les cachalots, les baleines, etc.; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 1041. - A le tuyau sur le dos. La zoologie moderne n'a pas signalé cette différence entre le dauphin et la baleine. - Apparentes. Le texte dit mots à mot : « Non couvertes ». Cette expression ne suffit pas pour qu'on voie très clairement ce qu'Aristote pense des branchies particulières des Sélaciens, comparées aux branchies des autres poissons. - Les chiens de mer et les batos. Ces identifications ne sont pas certaines. On ne sait pas précisément ce qu'est le sélacien appelé batos. J'ai reproduit simplement le mot grec. Mais le batos est de la famille des raies. Voir le catalogue de MM. Aubert et Wimmer, p. 145.

§ 5. Ce qui contient deux parties. Le texte est moins précis. La définition de l'œuf est exacte; car ce qui le constitue essentiellement, c'est d'avoir deux parties, dont l'une sert à la nourriture de l'autre. - C'est un ver. La différence de l'œuf au ver, telle que l'entend Aristote, est évidente. Le scolex une fois né n'a plus rien à demander qu'au dehors, pour acquérir son développement. Dans l'œuf au contraire, l'animal qui y est contenu se nourrit d'une partie de l'œuf, qui le renferme.

§ 4. Comme les Sélaciens. Pour la fécondation des Sélaciens, voir le Traité de Zoologie de Mr. Claus p. 815. - Comme l'homme et le cheval. J'ai conservé la formule d'Aristote. Peut-être eût-il été plus régulier de dire : « la femme et la jument  ».

§ 5. C'est un être vivant qui en sort. Répétition de ce qui précède. - C'est un ver. Aristote aurait pu expliquer plus précisément cette troisième espèce de génération. qui est moins évidente que les deux autres.

§ 6. Leur enveloppe est molle. Sans doute en comparaison de la coquille dans les oiseaux ; car l'enveloppe des œufs de sélaciens n'est pas absolument molle, puisqu'elle a la consistance du parchemin; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 815.

§ 7. Les uns se meuvent. II eût été bon de citer des exemples.

§ 8. De la Génération des animaux. Voir le traité spécial. - De la Génération des animaux, voir les liv. Il et III de ce traité, liv. II, ch. IV, p. 126, édit. Aubert et Wimmer et tout le liv. III, pp. 212 et suiv., même édition et traduction.

CHAPITRE V Animaux pourvus de pieds; animaux sans pieds; dipodes; tétrapodes; polypodes; les pieds sont toujours en nombre pair; animaux qui nagent; poissons sans nageoires; position des nageoires; poissons qui ont à la fois des pieds et des nageoires; volatiles qui ont des ailes de plume; volatiles à membranes plus ou moins épaisses; volatiles qui ont du sang ou qui n'en ont pas; volatiles à élytres; dimensions des animaux dans l'eau ou sur terre, et selon les climats; moyens généraux de locomotion chez les animaux; nombre de pieds ; mouvement diamétral.

§ 1. Certains animaux ont des pieds; d'autres n'en ont pas [5] ; et parmi ceux qui ont des pieds, il n'y a que l'homme et l'oiseau qui en aient deux. D'autres en ont quatre, comme le lézard et le chien; d'autres en ont davantage, comme la scolopendre et l'abeille. Mais dans tous les animaux, le nombre des pieds est toujours pair.

§ 2. Parmi les animaux qui nagent, tous ceux qui sont privés de pieds ont des nageoires, comme les poissons. Quelques-uns ont quatre [25] nageoires, dont deux en haut dans les parties supérieures, et deux en bas dans les parties inférieures, comme la dorade et le loup de mer. D'autres n'ont que deux nageoires seulement; et ce sont les poissons allongés et lisses, comme l'anguille et le congre.  § 3. Il y a des poissons qui sont absolument dépourvus de nageoires, comme la murène; ceux-là se servent de l'eau, comme les serpents se servent de la terre; et ils se meuvent [30] de la même façon dans le liquide.

§ 4. Parmi les sélaciens, il y en a qui n'ont pas de nageoires; et ce sont ceux qui sont larges et pourvus de queue, comme la raie et la pastenague; ceux-là nagent grâce à leur largeur. Mais la grenouille de mer a des nageoires, ainsi qu'en ont tous les poissons dont la largeur ne va pas en s'amincissant.

§ 5. Ceux qui ont des apparences de pieds, comme les mollusques, se servent à la fois de ces pieds et de leurs nageoires; [35] et ils nagent plus rapidement sur le ventre, comme la seiche, le calmar et le polype; mais aucun des deux premiers ne peut marcher, comme le polype.

§ 6. Les crustacés, comme la langouste, nagent avec leur queue; mais ils nagent plus vite dans le sens de la queue, à cause des nageoires qu'elle porte. Le cordyle nage avec les pieds et la queue; et sa queue [5] ressemble à celle du Silure (ou Glanis), autant qu'une petite bête ressemble à une grande.

§ 7. Parmi les volatiles, les uns ont des plumes, comme l'aigle et l'épervier; d'autres ont des membranes, comme l'abeille et le hanneton;  d'autres ont des ailes semblables à du cuir, comme le renard-volant et la chauve-souris.

  § 8. Tous les volatiles qui ont du sang ont des ailes de plume; les volatiles à ailes de cuir ont aussi du sang. Tous ceux qui n'ont pas de sang ont, comme les insectes, des ailes de duvet.

§ 9. [10] Les volatiles à ailes de plume et à ailes de cuir, ont deux pieds ou n'ont pas de pieds; et l'on affirme qu'en Éthiopie on trouve des serpents qui sont organisés de même. Les volatiles qui ont des ailes à plume s'appellent des oiseaux ; les deux autres espèces de volatiles n'ont pas reçu un nom spécial et unique, qui les comprendrait toutes les deux.

§ 10. Parmi les volatiles qui n'ont pas de sang, les uns ont un fourreau pour leurs ailes : ce sont les coléoptères, comme les hannetons et les scarabées. Les autres n'ont pas de fourreau ; et ils ont tantôt deux ailes et tantôt quatre.

§ 11. Les quatre ailes appartiennent à ceux qui sont d'une certaine grandeur, et qui ont un dard en arrière; ceux qui ne sont pas grands et qui ont le dard en avant, n'ont que deux ailes.

§ 12. Pas un seul coléoptère n'a de dard. Ceux des insectes [20] dont le dard est en avant n'ont que deux ailes, comme la mouche, le myope, le taon et le cousin.

§ 13. Tous les animaux privés de sang sont plus petits que ceux qui ont du sang, à l'exception de quelques animaux marins, qui, bien que privés de sang, n'en sont pas moins énormes, comme certains mollusques. Les plus grands animaux de ce genre se trouvent dans les pays les plus chauds ; et dans la mer, [25] les animaux sont toujours plus grands que sur terre et dans les eaux douces.

§ 14. Tous les animaux qui peuvent se mouvoir se meuvent par quatre points, ou plus. Les animaux qui ont du sang n'ont que ces quatre points; tel est l'homme, qui a deux mains et deux pieds. L'oiseau a deux ailes et deux pieds aussi.

§ 15. Les quadrupèdes et les poissons ont, les uns quatre pieds; les autres, quatre [30] nageoires. Ceux qui n'ont que deux nageoires, ou qui même n'en ont pas du tout, comme le serpent, n'en ont pas moins les quatre points, puisque les flexions du corps sont au nombre de quatre, ou de deux, avec deux nageoires.

§ 16. Tous les animaux qui, n'ayant pas de sang, ont plus de quatre pieds, qu'ils soient d'ailleurs volatiles ou qu'ils marchent sur terre, se meuvent par plus de quatre points de mouvement, comme l'animal qu'on nomme l'éphémère, qui a tout ensemble quatre pieds et [491a] quatre ailes; car celle bête a non seulement cette particularité d'existence qui lui a valu le nom qu'elle porte; mais de plus, elle a cette autre particularité d'être un volatile avec quatre pieds.

§ 17. Tous les quadrupèdes et les polypèdes se meuvent d'ailleurs d'une manière semblable : leur mouvement est diamétral; et tous [5] les animaux ont, pour leur locomotion, deux pieds qui la commandent tour à tour; il n'y a que le crabe seul qui ait quatre pieds de devant.  

§ 1. Certains animaux ont des pieds. Cette distinction entre les divers ordres d'animaux n'est pas moins exacte que toutes les précédentes. - L'homme et l'oiseau. C'est à cette ressemblance que se rapporte la prétendue définition de l'homme par Platon. - Scolopendre. Voir plus loin, liv. II, ch. x, § 2. Insecte venimeux, qui forme la seconde famille du premier ordre des insectes ; ce sont les myriapodes. Il y a des scolopendres qui ont jusqu'à quarante-deux pieds, et même encore un plus grand nombre: voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 335. Traité de Zoologie de M. Claus, p. 535. Les scolopendres sont peut-être vivipares. On les appelle aussi chilopodos, à cause de leurs pattes-mâchoires. - L'abeille. Voir Cuvier. Règne animal, t. V, p. 380, et Traité de Zoologie de M. Claus, p. 665. - Toujours pair. Parce que le corps se compose de deux moitiés, qui chacune doivent avoir des organes semblables.

§ 2. Les animaux qui nagent. Ce qui comprend beaucoup d'autres animaux, outre les poissons proprement dits. - La Dorade. Les dorades sont comprises dans la quatrième famille des Acanthoptérygiens. L'espèce qu'indique ici Aristote est, dit Cuvier, un beau et bon poisson que les anciens nommaient Chrysophrys, Sourcil d'or, à cause d'une bande en croissant de couleur dorée, qui va d'un œil à l'autre. Voir Règne animal, tome ll, p. 182. Cuvier écrit Daurade et non Dorade; je ne sais pourquoi. Les dorades sont très abondantes dans la Méditerranée; et elles forment un manger délicat. - Loup de mer. Le bar commun, grand poisson, d'un goût excellent, le lupus des Romains, le labrax des Grecs, dit Cuvier, Règne animal, p. 133, tome II. Le labrax fait aussi partie de l'ordre des Acanthoptérygiens, première famille des Percoïdes ou Percides; voir Traité de Zoologie de M. Claus, p. 847. - L'anguille et le congre. Poissons fort ressemblants entre eux et de la même famille; Cuvier, Règne animal, tome II, pp. 318 et 350; et Traité de Zoologie de M. Claus, p. 834. - La murène. Qui se confond avec l'anguille. - Comme les serpents. Voir un passage tout pareil, dans le Traité du Mouvement des animaux d'Aristote, ch. VII, où il est question aussi de l'anguille et du congre. Pline a copié ce passage, liv. XI, ch. XXXVII, p. 371, édition Littré.

§ 4. La Pastenague. C'est le nom que les Latins ont donné au poisson qu'Aristote appelle le Trygon. Selon Pline, liv. IX, ch. LXXIII, édition Littré, la Pastenague est très redoutable, à cause de l'aiguillon qu'elle porte à la queue, dont elle tue les poissons et dont elle perce même les troncs d'arbre. La Pastenague, appelée aussi Trygon, du nom grec, par quelques naturalistes, fait partie des chondroptérygiens, à branchies fixes; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 399; et Traité de Zoologie descriptive de M. Claus, p. 820. C'est une espèce de raie. - La grenouille de mer. Le texte dit simplement : « la grenouille »; mais il est évident que c'est de la grenouille de mer qu'il s'agit.

§ 5. Les mollusques. Le terme est bien général; les mollusques sont excessivement nombreux, formant à eux seuls la seconde grande division du règne animal et se divisant eux-mêmes en six classes : voir le Règne animal de Cuvier, tome III, pp. 1 à 180. Il y a des mollusques qui marchent, au moyen des protubérances charnues, fortes et allongées, avec lesquelles ils saisissent les objets. Certaine classe de mollusques s'appelle Céphalopodes, Ptéropodes et Gastéropodes. Mais Aristote a raison de dire que ce sont des apparences de pieds, plutôt que des pieds véritables. - Et le polype. MM. Aubert et Wimmer proposent de retrancher ces mots. - Marcher comme le polype. Si toutefois l'on peut dire que le polype marche tellement. Les polypes, appelés polypes d'Aristote, sont de l'espèce des seiches ou poulpes, qui sont également des mollusques: Cuvier, Règne animal, tome III, p. 12.

§ 6. Les crustacés. Les crustacés forment la première classe des animaux articulés; ils ont en général une carapace, qui recouvre leurs branchies; voir Cuvier. Règne animal, tome IV, pp.7 et suiv. - La langouste. Cuvier ne doute pas que l'animal ici désigné ne soit la langouste, de la famille des crustacés décapodes; voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 81; en latin, Locusta. - Dans le sens de la queue. Les mots grecs ne semblent pas pouvoir présenter un autre sens. Ceci voudrait dire alors que la langouste nage en arrière. Je ne sais pas si le fait est exact. - Le cordyle. Voir plus haut, ch. I, § 12. - Le silure (ou Glanis). Le silure est un poisson rangé dans le second ordre des Malacoptérygiens; c'est un poisson d'eau douce et un des plus grands; il n'a pas d'écailles; sa peau est nue, ou formée de grandes plaques osseuses. Il y a des espèces qui ont sur le dos une forte épine, que l'animal peut dresser et qui devient alors fort dangereuse. Le Silure a été confondu souvent avec le Glanis; voir Cuvier, Règne animal, tome Il, p. 299. - Une petite bête. C'est le cordyle.

§ 7. L'aigle et l'épervier. Ces deux oiseaux présentent beaucoup d'espèce; voir Cuvier, Règne animal, tome 1, pp. 324 et 333. - Le hanneton. De l'ordre des Coléoptères, famille des Lamellicornes. Les naturalistes l'appellent aussi du nom grec Mélolonthta; voir Cuvier, Règne animal. tome IV, p. 558; et Traité de Zoologie de M. Claus, p. 641, Arthropodes. - Le renard-volant. Le texte dit simplement : « le renard ». Je n'ai pas trouvé à identifier cet insecte. - La chauve-souris. Voir plus haut, ch. 1, § 17.

§ 8. A ailes de cuir. Ou ailes membraneuses, comme celles de la chauve-souris. - N'ont pas de sang. Ou plutôt, ont un sang incolore, un sang blanc.

§ 9. Des serpents qui sont organisés de même. Le texte n'est pas plus clair; et ceci peut vouloir dire à la fois qu'il y a des serpents à deux pieds ou des serpents ailés. Aristote d'ailleurs n'affirme rien pour son propre compte; il ne fait que rapporter un récit : « On affirme ».  - L'Éthiopie, qui encore aujourd'hui est si peu accessible, l'était encore bien moins du temps des Anciens. Tout le Moyen-âge a cru aussi à des serpents ailés, ou dragons. - Les deux autres espèces. A ailes membraneuses et à ailes de duvet. MM. Aubert et Wimmer croient que les deux espèces désignées ici sont les notables à ailes membraneuses, pourvus de pieds et dépourvus de pieds.

§ 10. Qui n'ont pas de sang. Voir plus haut, § 8. - Coléoptères. Le nom est resté dans la zoologie moderne. - Les scarabées. Le terme employé dans le texte est aussi général que celui de ma traduction. Les scarabées présentent des espèces très nombreuses. On croit qu'il s'agit ici de celui qu'on appelle spécialement Ateuchus Sacer, ou Ateuchus des Égyptiens; voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 533.

§ 11. D'une certaine grandeur. Cette définition est bien vague. - N'ont que deux ailes. Voir le § suivant, où ceci est répété.

§ 12. Pas un seul coléoptère n'a de dard. Voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 352. - La mouche. Selon toute probabilité, il s'agit de notre mouche ordinaire, aussi commune en Grèce que dans le reste de l'Europe ; voir Cuvier, Règne animal, tome V, p. 509. - Le myope, id., ibid. p. 506.  - Le taon. Ou l'oestre, en conservant le mot grec, comme le fait la zoologie moderne; id., ibid., p. 500. - Le cousin. De la famille des némocères; le cousin commun (culex pipiens) est sans doute celui dont Aristote parle ici. Voir aussi le Traité de Zoologie de M. Claus, pp. 602, 603 et 607.

§ 13. Certains mollusques. Voir plus loin, liv. 1V, ch. 1, § 12, où Aristote parle de la grandeur extraordinaire de certains polypes. - De ce genre. Peut-être pourrait-on généraliser davantage cette observation ; et elle ne serait pas moins vraie appliquée à l'ensemble des animaux, au lien d'être appliquée seulement aux mollusques. - Dans la mer. En effet, les plus grands de tous les animaux sont les baleines.

§ 14. Par quatre points. C'est le mot même dont se sert le texte grec. - L'homme... l'oiseau. La conformité de plan est manifeste, quelques différences que présentent ces deux ordres d'animaux; chez les quadrupèdes comparés à l'homme, c'est encore plus évident.

§ 15. Les quadrupèdes. Cet ordre d'animaux aurait été placé plus convenablement à côté de l'homme, au paragraphe précèdent. - Les flexions du corps sont au nombre de quatre. Ceci est exact pour les quadrupèdes; ce ne l'est plus pour les poissons. - Ou de deux avec deux nageoires. En en comptant deux de chaque côté; mais il y a des poissons sans nageoires; et il serait difficile de trouver quatre flexions dans les serpents. Tous ces faits sont tellement évidents qu'il est probable qu'il y a ici quelque désordre dans le texte; mais les manuscrits n'offrent pas de variantes. MM. Aubert et Wimmer ont proposé quelques changements au texte grec.

§ 16. L'éphémère. Insecte névroptère, subulicorne; voir Cuvier, Règne animal, tome V, p. 241. - Le nom qu'elle porte. Le mot d'éphémère veut dire en effet : « Qui ne vit qu'un jour » et il paraît bien que, dans son état parfait, l'insecte ne vit réellement qu'un jour, et pour se reproduire uniquement; mais à l'état de larve, il vit beaucoup plus longtemps. Dans le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 575, les éphémérides sont la seconde famille des amphibiotiques, insectes arthropodes. - Un volatile avec quatre pieds. Cette particularité n'a été remarquée que par Aristote. On ne la trouve pas signalée par les naturalistes modernes. Voir plus loin, liv. V, ch. XVII, § 19.

§ 17. Diamétral. C'est le mot même du texte; il est parfaitement juste. Le fait est évident pour les quadrupèdes aussi bien que pour l'homme; pour les polypèdes, l'auteur aurait bien fait d'être moins concis. - Deux pieds qui le commandent. Le texte dit précisément  «Deux pieds-chefs ». - Le crabe, famille des crustacés décapodes, brachyoures; Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 30. - Seul qui ait quatre pieds de devant. Les naturalistes modernes n'ont pas retenu cette observation. Tout ce qui ils disent des pieds du crabe, c'est que ces pieds-mâchoires sont généralement plus courts et plus larges que dans les autres décapodes; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, pp. 483 et 498, et Cuvier, loc. cit.

CHAPITRE VI Diversité des genres des animaux; les genres les plus étendus sont ceux des oiseaux, des poissons et des cétacés; coquillages durs; coquillages mous; mollusques; insectes; genres privés de sang; distinctions dans les quadrupèdes, vivipares, ovipares; distinctions plus ou moins précises des espèces. - Méthode à suivre dans l'histoire des animaux; il faut commencer par l'étude de l'homme, qui nous est le mieux connu de tous; étude préalable des parties organiques.

§ 1. Les autres genres d'animaux les plus étendus et leurs divisions principales sont les oiseaux, les poissons et les cétacés. Tous ces animaux ont du sang.

§ 2. Un autre genre [10]  est celui des testacés, qu'on appelle huîtres ou coquillages. Puis, le genre des animaux à coquilles molles (crustacés), pour lesquels il n'y a pas de nom unique qui les comprenne tous, tels que les langoustes, les cancres et les écrevisses; puis le genre des mollusques, comme la seiche, le grand et le petit calmar. Un autre genre est celui des insectes.

§ 3. Ces quatre genres sont tous privés de sang; et tous ceux d'entre eux qui ont des pieds [15] en ont un grand nombre. Parmi les insectes, quelques-uns sont volatiles.

§ 4. Les animaux autres que ceux-là ne forment pas de grandes classes ; car il n'y a plus pour eux de genre qui contienne plusieurs espèces. Parfois, l'espèce est simple et n'offre pas de différences spécifiques, comme pour l'homme, par exemple; d'autres fois, le genre renferme bien plusieurs espèces; mais elles n'ont pas reçu de nom particulier.

§ 5. Tous les quadrupèdes, qui ne sont pas [20] pourvus d'ailes, ont du sang; mais les uns sont vivipares; et les autres, ovipares. Les vivipares ne sont pas tous pourvus de poils; mais tous ceux des quadrupèdes qui sont ovipares ont des écailles, qui jouent un rôle semblable aux écailles des poissons.

§ 6. Le genre des serpents est sans pieds, quoique, par sa nature, il ait du sang et vive sur terre; leur peau est écailleuse. Tous les serpents [25] sont ovipares, excepté la vipère, qui est vivipare.

§ 7. D'ailleurs, tous les vivipares n'ont pas de poil; et c'est ainsi qu'il y a des vivipares parmi les poissons; mais les animaux qui sont pourvus de poils sont tous vivipares. Il faut du reste prendre aussi pour une espèce de poils ces poils en forme d'épines que portent les hérissons de terre et les porcs-épics. Ces épines en effet remplissent la fonction [30] de poils, mais non pas de pieds, comme celles des hérissons de mer.

§ 8. Dans le genre des quadrupèdes vivipares, il y a une foule d'espèces; mais elles n'ont pas reçu de nom ; on les désigne chacune pour ainsi dire comme on le fait pour l'homme, et l'on dit : le lion, le cerf, le cheval, le chien, et ainsi de suite. Cependant il y a un surnom [491b] commun pour le genre des animaux à queue de crins, qu'on appelle lophoures, comme le cheval, l'âne, le mulet, le bidet, le bardeau, et même les bêtes appelées hémiones en Syrie. Ces bêtes ont reçu ce nom à cause de leur ressemblance avec le mulet, bien que ce ne soit pas tout à fait la même espèce, puisque les hémiones s'accouplent et sont féconds entre eux.

§ 9. Nous aurons pour cette raison [5] à considérer chacun des animaux à part, pour étudier la nature de chacune de leurs espèces.

§ 10. Du reste, nous n'avons fait jusqu'à présent que tracer une simple esquisse, comme on vient de voir, pour donner un avant-goût des objets que nous traiterons et de la manière dont nous les traiterons. Plus tard, nous examinerons les choses plus en détail, afin de saisir d'abord les différences [10] réelles qui divisent les animaux et les conditions qui sont communes à tous. Ensuite, nous devrons nous efforcer de découvrir les causes de tous ces faits; car c'est ainsi qu'on peut se faire une méthode conforme à la nature, une fois qu'on possède l'histoire de chaque animal en particulier, puisqu'alors on voit aussi évidemment que possible à quoi il faut appliquer sa démonstration et sur quelle base elle s'appuie.

§ 11. Notre premier soin sera d'étudier les [15] parties dont se composent les animaux; car c'est là la plus grande et la première différence entre eux, selon qu'ils ont telles parties ou qu'ils ne les ont pas, selon la position et l'ordre de ces parties, ou selon qu'ils ont les premières différences qui ont été déjà mentionnées par nous : la forme de ces parties, leurs dimensions plus ou moins grandes, l'analogie, et la contrariété de leurs dispositions.

§ 12. Nous nous appliquerons donc tout d'abord à l'étude des parties [20] dont l'homme se compose; car de même qu'on estime la valeur des monnaies en les rapportant à celle qu'on connaît le mieux, de même il faut en faire autant pour toute autre chose. C'est l'homme qui nécessairement nous est le mieux connu de tous les animaux. Il suffit du témoignage de nos sens pour savoir quelles sont ses parties; mais cependant, pour ne rien omettre dans la suite de notre description et pour joindre à raison [25] aux données de l'observation sensible, nous parlerons en premier lieu des parties qui forment les organes de l'homme, et ensuite, des parties similaires.  

§ 1. Les autres genres d'animaux. Les genres autres que ceux dont on vient de parler, c'est-à-dire l'homme et les quadrupèdes. C'est ce que semblent indiquer les divisions suivantes. - Les plus étendus. Mot à mot : « les plus grands ». - Les oiseaux, les poissons et les cétacés. Voir plus loin, liv. II, ch. XI, § 1, des divisions analogues, dont cependant Aristote ne prétend pas faire des cadres généraux d'histoire naturelle.

§ 2. Testacés. Ou animaux à coquilles, dans le genre des huîtres. - (Crustacés). Les crustacés forment la seconde classe des animaux articulés: voir Cuvier, Règne animal, tome Ill, p. 183, et tome IV, p. 30; Traité de Zoologie de M. Claus, p. 398. Ce dernier auteur trouve que ce nom de crustacés est peu justifié pour les petites formes à téguments minces. D'après la définition de l'Académie française, les crustacés sont des animaux qui sont couverts d'une enveloppe dure mais flexible, et divisée par des jointures. L'exemple cité est celui de l'écrevisse. Les définitions des crustacés par les naturalistes sont en général assez différentes les unes des autres, et elles sont peu précises. J'ai mis crustacés entre parenthèses comme résumant la définition donnée par Aristote : « Animaux à coquilles molles ». - Il n'y a pas de nom unique. II semble au contraire, d'après le texte même, que la langue grecque a ce nom unique qui comprend toute cette classe d'êtres : « Malacostracés », ou crustacés. Voir plus haut; ch. V, § 6. - Le grand et le petit calmar. Voir Cuvier, Règne animal, tome III, p. 15. Les calmars sont de la première classe des mollusques. Céphalopodes. - Celui des insectes. Ainsi, il y a quatre principaux genres, qui n'épuisent pas d'ailleurs le règne animal : crustacés, testacés, mollusques et insectes. Ce sont les ordres inférieurs. après l'homme, les quadrupèdes, les oiseaux, les poissons, les cétacés.

§ 3. Ces quatre genres. Le texte est moins précis et dit simplement: « Tous ces animaux » - Privés de sang. La zoologie moderne dit simplement qu'ils ont du sang incolore. - Parmi les insectes. Cette observation ne paraît pas bien à sa place ici.

§ 4. De grandes classes. En effet, les énumérations qu'Aristote vient de faire comprennent à peu près toute la série animale, telle qu'elle se présente à l'œil nu. Le microscope a révélé bien des espèces que les Anciens n'ont pas pu connaître. - Le genre... plusieurs espèces. Le texte se sert du même mot pour genre et espèce. J'ai dû faire la distinction qu'il ne fait pas. - L'espèce est simple... Peut-être faudrait-il dire : « Le genre », au lieu de l'espèce. - Comme pour l'homme. Ceci n'est pas parfaitement exact, et l'on pouvait, même dès le temps d'Aristote, distinguer l'espèce noire de l'espèce blanche; car les Grecs connaissaient très bien les Nègres. - Le genre renferme bien.... Le texte est un peu moins précis.

§ 5. Qui ne sont pas pourvus d'ailes. MM. Aubert et Wimmer pensent avec raison que ces mots sont ici tout à fait déplacés, et ils les mettent entre parenthèses, dans leur texte et dans leur traduction. - Et les autres ovipares. Il n'y a guère que le lézard qui soit un quadrupède ovipare. - Des écailles... aux écailles des poissons. Notre langue n'a pas deux mots différents, comme la langue grecque, pour désigner les écailles de serpents et les écailles de poissons. Cuvier, Règne animal, tome Il, pp. 72, 76, 81, etc., ne parle guère que des écailles des Ophidiens; parfois cependant, il parle aussi de leurs plaques. Peut-être faudrait-il adopter ce dernier mot dans la traduction, toutes les fois qu'il s'agit des serpents. On pourrait encore employer le mot d'écussons.

§ 6. Leur peau est écailleuse. Voir la remarque précédente. La langue grecque se sert encore ici du même mot que le texte vient d'employer. - La vipère qui est vivipare. Cuvier, Règne animal, tome Il, p. 87, fait observer que le nom de vipère est une contraction de vivipare, parce que ses œufs éclosent avant d'avoir été pondus. Ce n'est pas d'ailleurs une condition particulière à la vipère; presque toutes les espèces venimeuses en sont là. Pour les écailles des serpents, voir aussi le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 889.

§ 7. Des vivipares parmi les poissons. Tous les cétacés sont vivipares. - Ces poils en forme d'épines, ou de piquants. Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 124, dit : « Les hérissons ont le corps couvert de piquants, au lieu de poils ». C'est la pensée d'Aristote, et presque ses expressions mêmes. - Des hérissons de mer. Ou oursins. Ces animaux ont sur leur test des épines articulées, mobiles au gré de l'animal; il s'en sert pour ses mouvements, conjointement avec ses pieds qui sont situés entre elles; Cuvier, id., tome III, p. 234; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, pp. 238 et suiv.

§ 8. Avec le mulet. J'ai cru devoir ajouter ces mots pour plus de clarté; ils me semblent indispensables à cause de ce qui suit. Le mot d'Hémione signifie étymologiquement demi-âne; et c'est bien aussi le nom qu'on pourrait donner au mulet; seulement le mulet ne se reproduit pas, tandis que l'hémione se reproduit; ce qui constitue une différence d'espèce bien notable.

§ 9. Pour cette raison. Le texte n'est pas plus précis que ma traduction. Sans doute, Aristote veut dire qu'il y aura lieu d'étudier soigneusement chaque espèce d'animaux, sous le rapport de la génération.

§ 10. Une simple esquisse. On sait que c'est le procédé habituel d'Aristote, qui présente tout d'abord une vue générale de son sujet, avant d'entrer dans les détails; voir plus haut, ch. 1, § 1. - Avant-goût. Cette métaphore est dans le texte. - De découvrir les causes. C'est l'objet spécial du Traité des Parties des Animaux, liv. Il, ch. I; Aristote y montre comment ce traité est le complément de l'Histoire des Animaux. - Une méthode conforme à la nature. Personne parmi les modernes n'a jamais rien dit de mieux; et l'on voit si l'on peut soutenir que les Anciens n'ont pas connu la méthode d'observation. - De chaque animal en particulier. II faut donc commencer par constater les faits, avant d'essayer de les expliquer par des théories générales. - Sa démonstration. C'est le mot même du texte; et ici, il est très particulièrement bien employé, puisque les explications sont précédées de l'étude des faits particuliers, d'où on les tire.

§ 11. Déjà mentionnées par nous. Voir plus haut, ch. 1, §§ 5 et suivants.

§ 12. Dont l'homme se compose. Aristote a raison de commencer par l'étude de l'homme; car si l'homme est le plus compliqué de tous les animaux, c'est celui que nous pouvons le mieux connaître, puisque chacun de nous porte en lui-même l'homme, qu'il peut directement étudier. Buffon et Cuvier ont commencé leur histoire naturelle par l'homme. La Zoologie contemporaine commence au contraire, comme on peut le voir dans la Zoologie de M. Claus, par les animaux les plus simples, pour aboutir à l'homme, ou plutôt aux Primates, parmi lesquels comptent toujours les singes. Linné adopte aussi la classification ordinaire. Celle d'Arioste, suivi de Buffon et de Cuvier, est infiniment préférable, à tous let points de vue. On a objecté qu'Aristote connaissait l'anatomie humaine beaucoup moins bien que celle des animaux; c'est douteux; mais quand même ce serait exact, il est certain que nous pouvons toujours observer l'homme bien plus aisément que tout autre animal, puisque nous pouvons nous observer sans cesse nous-mêmes, et observer sans cesse nos semblables. - Nécessairement. Aristote fait bien d'insister si vivement. - Du témoignage de nos sens. Le texte n'est pas aussi précis. - Dans la suite de note description. Même remarque. - Qui forment les organes. Aristote appelle ici organes ce que plus haut il a appelé membres. Voir plus haut, ch. 1, § 2; ce qui ne veut pas dire qu'on puisse confondre les organes et les membres. J'ai ajouté : « De l'homme » pour plus de clarté. - Des parties similaires. Voir plus haut ch. I § 4. Pour toutes ces généralités si importantes, il faut rapprocher des théories d'Aristote la 1ère Leçon de l'Anatomie comparée de Cuvier, 1ère édition.

CHAPITRE VII Principales parties du corps humain : tête, cou, tronc, bras, jambes; le crâne est la partie de la tête qui est chevelue; la fontanelle, l'occiput, le sommet du crâne; os du crâne; sutures dans la femme et dans l'homme.

§ 1. Les parties principales entre lesquelles on peut diviser l'ensemble de notre corps entier sont : la tête, le cou, le tronc, les deux bras, les deux jambes; j'entends par le tronc toute la concavité qui s'étend du cou [30] jusqu'aux parties honteuses.

§ 2. Dans les parties de la tête, celle qui est couverte de cheveux s'appelle le crâne. Dans le crâne, la partie antérieure est la fontanelle, qui ne se produit que postérieurement, puisque c'est l'os de notre corps qui se solidifie le dernier. La partie du crâne placée en arrière est l'occiput; et la partie placée entre l'occiput et la fontanelle est le sommet du crâne.

§ 3. Sous la fontanelle, est placé le cerveau; et l'occiput [492a] est vide. Le crâne entier est un os complètement sec, arrondi, et enveloppé d'une peau qui n'a pas de chair. Chez les femmes, il n'y a qu'une suture, qui est circulaire; chez les hommes, il y a trois sutures, qui d'ordinaire se réunissent en une seule; cependant on a déjà vu un crâne d'homme qui n'avait [5] aucune espèce de suture.

§ 4. Le sommet du crâne est le centre et le point de séparation des cheveux. Chez quelques-uns, ce point est double ; et ces sujets ont alors deux sommets de la tête; non pas qu'il y ait deux os, mais il y a seulement deux points de séparation pour les cheveux.

§ 1. Le cou, le tronc. MM. Aubert et Wimmer ordonnent un peu autrement l'énumération de ces diverses parties du corps humain, afin d'éviter la répétition du mot tronc. Je conserve l'ordre le plus habituellement reçu; le tronc vient mieux après le cou, parce que les bras et les jambes sont détachés davantage de l'ensemble. - La concavité. Le mot du texte est au moins aussi général. - Parties honteuses. C'est la traduction littérale de l'expression grecque.

§ 2. La partie antérieure est la fontanelle. Le mot que je rends par fontanelle n'a pas en grec un sens bien déterminé; et dans la langue de l'anatomie moderne, il n'y a pas d'expression pour rendre cette partie du crâne qu'Aristote veut désigner, et qui s'étend depuis le front jusque vers le milieu de la tête. - Ou ne se produit que postérieurement J'ai traduit mot à mot; mais je doute que le fait signalé ici soit exact. Ce qui est vrai, c'est que chez l'enfant qui vient de naître cette partie du crâne est molle et mince, et qu'elle se solidifie plus tard. - L'occiput et la fontanelle. Même observation que plus haut.

§ 3. L'occiput est vide. Ceci ne se comprend pas bien, même on supposant aussi incomplètes qu'on voudra les connaissances anatomiques d'Aristote à certains égards. II est possible qu'il y ait ici une altération du texte, que tous les manuscrits ont reproduite et qui remonterait alors très-haut. L'occiput n'est pas vide, puisqu'il contient encore le cerveau; et sous le cerveau, le cervelet. - Il n'a qu'une suture. C'est également une erreur. - Il y a trois sutures. Autre erreur assez singulière, pour des faits aussi visibles et aussi faciles à constater. A l'âge adulte, le crâne de l'homme a huit os, et par conséquent huit sutures; voir Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 74. - Se réunissent en une seule. Autre erreur. - Aucune espèce de suture. Le fait n'est pas absolument impossible; mais je ne crois pas qu'il ait jamais été constaté scientifiquement. Il arrive quelquefois que l'âge oblitère les sutures; mais c'est un cas exceptionnel; et en général, les sutures sont à tous les âges très apparentes sur tous les crânes. Voir la note de MM. Aubert et Wimmer, qui d'ailleurs ne croient pas utile de relever les erreurs anatomiques que commet ici Aristote, précisément parce qu'elles sont trop évidentes. Voir aussi plus loin, liv. III, ch. VII, § 3, où ces détails sont en partie reproduits.

CHAPITRE VIII Place du visage; l'homme seul en a un; le front et ses formes diverses indiquent la portée de l'intelligence; les sourcils donnent des indications sur le caractère; les yeux et leurs parties diverses, paupières supérieure et inférieure, les cils, la pupille; partie noire, partie blanche de l'œil; coins des yeux; tous les animaux ont des yeux, excepté les crustacés; yeux de la taupe; blanc de l'œil pareil chez tous les hommes; variétés de couleurs de la partie noire chez l'homme seul; dimensions des yeux; leur position; indications morales qu'on peut tirer des yeux.

§ 1. La partie de la tête placée au-dessous du crâne s'appelle le visage, expression qui s'applique à l'homme seul  [10] parmi tous les animaux, puisqu'on ne dit pas le visage d'un poisson, ni d'un bœuf. La partie du visage placée sous la fontanelle et au-dessus des yeux est le front. Les hommes qui ont un grand front sont plus lents que les autres; ceux qui ont un front petit sont très vifs; ceux dont le front est large ont des facultés extraordinaires; ceux dont il est rond sont d'une humeur facile.

§ 2. Au-dessous du front sont les deux sourcils. [15] Quand les sourcils sont droits, c'est le signe d'une grande douceur; quand ils se courbent vers le nez, c'est un signe de rudesse. Infléchis vers les tempes, ils indiquent un esprit d'imitation moqueuse et de raillerie ; abaissés, ils indiquent un caractère envieux.

§ 3. Sous les sourcils sont placés les yeux. Naturellement, ils sont deux. Les parties de chaque œil sont les paupières, l'une en haut, l'autre en bas, garnies sur leur bord de poils [20], qui sont les cils. La partie centrale et liquide de l'œil par laquelle on voit est la pupille ; la partie qui l'entoure est noire ; et la partie extérieure à celle-ci est blanche. Une disposition commune aux deux paupières, supérieure et inférieure, ce sont les deux coins, l'un du côté du nez, l'autre du côté des tempes. Quand ces coins sont allongés, c'est le signe d'un caractère mauvais; quand leur chair est dentelée [25] comme les peignes, du côté du nez, cela indique une nature vicieuse.

§ 4. Toutes les espèces d'animaux ont des yeux, à l'exception des crustacés, ou de tel autre genre, aussi imparfait. Tous les vivipares en ont, excepté la taupe. On peut bien dire tout à la fois qu'elle a une sorte d'yeux, ou nier tout à fait qu'elle en ait. D'une manière absolue, elle ne [30] voit pas, et elle n'a pas certainement d'yeux qui soient apparents. Mais en lui enlevant la peau, on reconnaît qu'elle a la place des yeux, et les parties noires de l'œil, dans le lieu et à la position que la nature assigne aux yeux qui saillissent au dehors. On dirait que ceux de la taupe ont été mutilés au moment de la naissance, et que la peau a poussé par dessus.

§ 5. En général, le blanc de [492b] l'œil est pareil chez tous les hommes. Mais la partie qu'on appelle le noir offre de nombreuses différences. Chez les uns, elle est noire en effet; chez d'autres, elle est d'un bleu foncé; chez d'autres, d'un brun sombre; chez quelques-uns, elle est grise comme l'œil des chèvres. Cette dernière couleur est le signe d'un excellent caractère; et c'est aussi la couleur la plus favorable à une vue perçante. [5] Il n'y a que chez l'homme, ou plutôt c'est chez lui surtout, que la couleur des yeux varie tant. Les autres animaux n'ont qu'une seule couleur. Parfois les chevaux ont l'un des deux yeux de couleur bleue.

§ 6. Il y a des yeux qui sont grands ; d'autres sont petits; les meilleurs sont les yeux moyens. Tantôt les yeux sont très saillants; tantôt ils sont renfoncés; tantôt ils sont dans une position moyenne. Ce sont les yeux les plus renfoncés qui, dans tout animal, [10] ont la vue la plus perçante. La position moyenne indique un caractère excellent.

§ 7. Il y a des gens dont les yeux clignotent; d'autres, chez qui ils sont fixes, et d'autres dont les yeux ne sont, entre les deux, ni fixes ni mobiles. Cette disposition moyenne est encore l'indication d'une nature très bonne. Les uns ont des yeux impudents; et chez les autres, les yeux n'ont pas d'expression constante.  

§ 1. Expression qui s'applique à l'homme seul. Notre langue est à cet égard dans le même cas que la langue grecque; le mot de visage ne s'applique jamais qu’à l'homme. - Sous la fontanelle et au-dessus des yeux. Ici le sens de Fontanelle est évident ; c'est la naissance des cheveux et le point où se termine le front proprement dit; voir plus haut, ch. VII, § 2. - Les hommes qui ont un grand front. II n'est pas certain que l'école de Lavater soit d'accord sur ces divers points avec Aristote; il faut se rappeler d'ailleurs qu'il a fait un traité spécial de Physiognomonie. - Des facultés extraordinaires. Le mot grec peut avoir encore cet autre sens : « Sortent aisément d'eux-mêmes ».

§ 2. Quand les sourcils sont droits. Tous ces détails ne sont pas ici à leur place, quelle que soit d'ailleurs leur valeur. - Abaissés... envieux. Cette phrase donnée par l'édition-princeps des Aldes semble à MM. Aubert et Wimmer une interpolation.

§ 3. La partie centrale et liquide. Le mot de liquide a peut-être un sens exagéré; et l'on ne peut pas dire exactement que l'œil soit liquide, dans celte partie qu'on appelle l'iris. Surtout, on ne peut pas le dire de la pupille. - Par laquelle on voit. On ne voit pas par la pupille ; seulement la pupille est indispensable pour introduire la lumière; et la vision se fait au fond de l'œil sur la rétine. - Est noire. C'est l'expression même du texte; mais elle n'est pas exacte, puisque la couleur de l'iris varie beaucoup; voir plus bas, § 5. - Est blanche. C'est ce que nous nommons toujours aussi le blanc de l'œil. - Les deux coins. Ces deux coins ne sont pas pareils, comme on semble l'indiquer ici. - Quand ces coins sont allongés. Détails qui paraissent déplacés comme les précédents, §§ 1 et 2. - Comme les peignes. C'est la traduction littérale; il s'agit simplement des plis charnus. Cette comparaison avec des peignes n'a pas satisfait MM. Aubert et Wimmer; et ils ont proposé, d'après Albert le Grand et Schneider, divers changements où le mot grec qui signifie peigne prendrait le sens de caroncule. Ils croient aussi qu'il peut être question d'une membrane sanguine, analogue à celle des yeux du milan, et qui indique dans les yeux des hommes de fréquentes congestions de sang. - Une nature vicieuse. Cela peut n'être pas faux; mais ce n'est pas ici qu'on attendait ces détails.

§ 4. A l'exception des crustacés. Les yeux dans beaucoup de crustacés, et notamment dans la famille des malacostracés, sont portés sur un pédicule mobile et articulé. Pendant longtemps, on a pu ignorer que ce fussent là des yeux; voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 16. - Excepté la taupe. Ce que dit ici Aristote, en parlant de la taupe, prouve qu'il avait étudié cet animal de très près, et qu'il avait très bien vu les choses. Jusqu'au commencement de ce siècle, la Zoologie n'en a pas su davantage sur les yeux de la taupe; et aujourd'hui même, on convient toujours que les yeux sont si petits qu'on peut très bien s'y tromper. - Et que la peau a poussé par-dessus. M. Claus dit également en parlant de la taupe : « Les yeux sont recouverts par la peau, » p. 1070; voir aussi Cuvier, Règne animal, tome I, p. 130.

§ 5. Est pareil. II est blanc en effet chez tous les hommes; mais il y a encore beaucoup de nuances dans cette blancheur. - La partie qu'on appelle le noir. Voir plus haut, § 3. - Elle est noire. C'est exagéré, et l'iris n'est jamais noire, au sens vrai de ce mot : seulement elle est plus ou moins foncée. - Comme l'œil des chèvres. C'est la traduction exacte et la paraphrase du mot grec. - Le signe d'un excellent caractère. Même remarque que plus haut sur ces détails physiognomoniques. - La plus favorable à une vue perçante. Il ne paraît pas que cette observation soit exacte. - L'un des deux yeux. II y a des manuscrits qui modifient un peu cette leçon, et qui disent seulement que certains chevaux ont des yeux bleus. Il y a aussi quelques exemples dans l'espèce humaine de différences entre la couleur des deux yeux.

§ 6. Les meilleurs sont les yeux moyens. On doit peut-être entendre « les meilleurs », non pas dans le sens de l'acuité de la vue, mais dans le sens de la beauté. - Ont la vue la plus perçante. Peut-être cette observation n'est-elle pas très exacte. - Un caractère excellent. Même remarque que plus haut. On pourrait comprendre aussi que la disposition moyenne est la meilleure, comparativement aux deux autres dispositions, qui sont extrêmes.

§ 7. Entre les deux. Le texte dit précisément : Moyens. J'ai ajouté la paraphrase qui suit, pour plus de clarté. - D'expression constante. II me semble que c'est le sens le plus probable du mot qu'emploie le texte.

CHAPITRE IX Description de l'oreille ; erreur d'Alcméon; organe de l'ouïe; deux parties de l'oreille, dont l'une est le lobe; l'oreille ne communique pas avec le cerveau; l'oreille n'est immobile que chez l'homme; formes diverses de l'organe auditif chez les animaux; les oreilles de l'homme sont sur la même ligne que les yeux; dimensions des oreilles; description du nez; ses fonctions dans la respiration ; l'éternuement; organisation intérieure du nez; sens de l'odorat; le nez extraordinaire de l'éléphant; mâchoires et lèvres; description de la langue, sens des saveurs; amygdales; gencives; voile du palais.

§ 1. La partie de la tête par laquelle on entend, est l'oreille ; mais on ne respire pas par l'oreille ; et Alcméon n'est pas dans le vrai, quand il prétend que c'est par les oreilles que les chèvres [15] respirent.

§ 2. Des deux parties de l'oreille, l'une n'a pas de nom; l'autre s'appelle le lobe. Dans sa totalité, l'oreille est formée de cartilage et de chair. Le dedans de l'oreille est de sa nature pareil aux colimaçons; et le dernier os où le son pénètre, comme dans la cavité dernière, ressemble à l'oreille.

§ 3. L'oreille n'a pas d'orifice dans le cerveau; mais elle en a un [20] dans le voile du palais; et une veine partant du cerveau se rend à l'une et l'autre oreille. C'est aussi la disposition des yeux; ils communiquent avec l'encéphale; et ils sont tous deux placés sur une petite veine.

§ 4. De tous les animaux qui ont des oreilles, l'homme est le seul chez qui elle soit immobile; car parmi les animaux doués de l'organe de l'ouïe, les uns ont des oreilles; les autres n'en ont pas; et ils n'ont [25] à l'extérieur que le conduit auditif, comme tous les volatiles et les animaux à écailles.

§ 5. Tous les vivipares, excepté le phoque, le dauphin et les diverses espèces de sélaciens, ont des oreilles; car les sélaciens sont aussi des vivipares. Le phoque a des trous à l'extérieur qui lui permettent d'entendre. Le dauphin entend également, mais sans oreilles. [30] Tous les animaux remuent donc leurs oreilles; et l'homme est seul à ne pas les mouvoir.

§ 6. Les oreilles dans l'homme sont placées à la circonférence, sur la même ligne que les yeux; elles ne sont pas au-dessus, ainsi que dans quelques quadrupèdes. II y a des oreilles sans poils; il y en a de velues; d'autres tiennent le milieu. Ce sont ces dernières qui ont l'ouïe la meilleure; mais tout cela n'indique rien pour le caractère. II y a des oreilles grandes, petites, moyennes; quelquefois elles sont très proéminentes, [493a] ou ne le sont pas du tout, ou sont entre les deux.

§ 7. Les oreilles moyennes sont le signe d'un très bon caractère; les grandes oreilles, les oreilles relevées annoncent la loquacité et la sottise. La partie comprise entre l'œil, l'oreille et le sommet de la tête, s'appelle la tempe.

§ 8. [5] La partie du visage qui sert de passage à l'air, c'est le nez; c'est par le nez qu'on aspire et qu'on expire. C'est aussi par le nez que se fait l'éternuement, qui est l'expulsion de l'air accumulé; et c'est le seul parmi les vents de notre corps d'où on a tiré des présages sacrés.

§ 9. Mais il est certain que l'aspiration et l'expiration se font en même temps dans la poitrine, et que, sans [10] la poitrine, il serait impossible d'aspirer ou d'expirer par les narines seules, parce que c'est de la poitrine que l'aspiration et l'expiration viennent par le gosier, et qu'elles n'ont lieu par aucune partie de la tête. On peut vivre d'ailleurs sans faire usage de la respiration du nez.

§ 10. C'est aussi cet organe qui a le sens de l'odorat, et l'odorat n'est que la perception de l'odeur. Le nez peut se mouvoir; et il n'est pas immobile, [15] comme l'est particulièrement l'oreille. Une des parties du nez est un diaphragme, qui est un cartilage ; l'autre partie est un conduit qui est vide; car le nez a deux divisions. Dans l'éléphant, le nez est long et très fort; et il s'en sert comme d'une main. Il attire par cette sorte de main la nourriture [20] liquide ou sèche dont il a besoin; il la saisit et il la porte à sa bouche. Il est le seul des animaux à avoir cette conformation.

§ 11. L'homme a deux mâchoires; la partie de ces mâchoires qui s'avance davantage, c'est le menton ; l'autre qui est plus en arrière, c'est la mâchoire proprement dite. Tous les animaux ne remuent que la mâchoire inférieure, excepté le crocodile de rivière, qui est le seul à mouvoir la mâchoire d'en haut.

§ 12. Après [25] le nez, viennent les deux lèvres, qui sont de la chair d'une grande mobilité. La partie comprise en dedans des mâchoires et des lèvres, c'est la bouche, qui a elle-même deux parties, le palais et le pharynx.

§ 13. La langue a la perception du goût; et cette sensation a lieu surtout au bout de la langue; quand l'objet est posé sur la langue à sa partie plus large, la sensation est moins vive. La langue sent d'ailleurs aussi toutes les qualités des corps que sent le reste de la chair, la dureté, le chaud, [30] le froid ; et elle les sent tout aussi bien que les saveurs.

§ 14. La langue peut être large ou étroite, ou de grandeur moyenne. La langue de grosseur moyenne est préférable, et la prononciation est alors la plus nette possible; elle est encore, ou libre, ou embarrassée comme chez les bègues et les gens qui grasseyent. La chair de la langue est molle et spongieuse. L'épiglotte est une partie de la langue. L'amygdale dans la bouche est [493b] double; les gencives sont multipliées. Ces diverses parties sont charnues. En dedans des gencives, sont les dents, qui sont en os. En arrière de la bouche, il y a une autre partie qui porte le voile du palais et qui a la forme d'un grain de raisin; c'est un pilier couvert de veines. Si cette partie chargée de liquide vient à s'enflammer, c'est ce qu'on appelle le grain, et elle étouffe le malade.

§ 1. Mais on ne respire pas par l'oreille. Cette remarque, qui peut paraître assez singulière, est justifiée par la théorie d'Alcméon, qu'Aristote réfute. - Alcméon. Voir sur Alcméon, la Métaphysique, I, V, 9, et la note. - Que les chèvres respirent. II serait curieux de savoir sur quelles observations pouvait se fonder cette théorie d'Alcméon. – L'une n'a pas de nom. C'est la leçon ordinaire; et il paraît bien qu'on n'en peut pas tirer une autre des manuscrits. Cependant un manuscrit du Vatican, marqué par Bekker et par MM. Aubert et Wimmer, pourrait offrir matière à une variante qu'il faudrait traduire ainsi : « Le haut de l'oreille s'appelle l'aile de l'oreille. » La vieille traduction de Guillaume de Morbeka semble autoriser, du moins en partie, cette version. Mais un passage de Rufus, le médecin du Ier siècle après J.-C., rappelle formellement qu'Aristote ne donnait pas un nom spécial à la partie supérieure de l'oreille, et qu'il ne nommait que le lobe. Ce témoignage est d'autant plus décisif qu'il se trouve dans le traité de Rufus  Sur les noms des parties du corps humain. Il n'est pas possible qu'un homme aussi savant ait pu se tromper sur ce point dans un tel ouvrage; et il faut admettre qu'au temps d'Aristote, il n'y avait que le lobe de l'oreille qui reçût un nom particulier. Voir la note de MM. Aubert et Wimmer. - Le lobe. C'est encore aujourd'hui le nom de cette partie de l'oreille, c'est-à-dire du bout inférieur.

§ 2. Pareil aux colimaçons. C'est la traduction littérale; on peut trouver que le texte est par trop concis; mais le fait est si exact qu'une partie de l'appareil auditif se nomme encore le limaçon, parce qu'en effet il est enroulé en spirale à la manière de certains limaçons. Comme cette partie est tout à fait interne et profonde, il est clair que, pour la découvrir et la caractériser si bien, il avait fallu de longues et délicates dissections. La suite le prouve également. - Le dernier os. C'est sans doute aux Osselets de l'oreille que ceci fait allusion. - Dans la cavité dernière. Le texte dit mot à mot : « Comme dans le dernier vase ». L'oreille interne se compose, pour l'anatomie actuelle, de trois parties: le vestibule, les canaux demi-circulaires, et le limaçon. Au fond de cet appareil si délicat, se trouve le nerf auditif, qui reçoit les vibrations sonores et les transmet au cerveau. C'est bien, comme le dit Aristote, le fond du vase. - Ressemble à l'oreille. Ainsi que le remarquent MM. Aubert et Wimmer, ceci n'a pas de sens; mais les manuscrits n'offrent pas de variante.

§ 3. L'oreille. Le texte n'a qu'un pronom neutre indéterminé. Au lieu de l'oreille, on peut comprendre qu'il s'agit de l'appareil auditif tout entier. - D'orifice dans le cerceau. C'est le nerf auditif qui conduit le son au cerveau; mais Aristote ne connaissait pas ce nerf; voir la note de MM. Aubert et Wimmer. - Dans le voile du palais. En effet, la trompe d'Eustache, qui est un large conduit, met l'intérieur de la caisse du tympan en communication constante avec l'arrière-gorge, pour introduire l'air; et en sens contraire, pour faire sortir les mucosités qui pourraient gêner l'audition. - A l'une et l'autre oreille. C'est la leçon donnée par plusieurs manuscrits; mais d'autres, qu'ont suivis MM. Aubert et Wimmer, n'ont qu'un pronom neutre indéterminé, qu'on ne peut rapporter qu'à la partie interne de l'oreille ou à l'oreille entière. - C'est aussi la disposition des yeux... Une petite veine. Cette phrase interrompt la suite des pensées; les yeux n'ont rien à faire ici. MM. Aubert et Wimmer pensent, avec raison, que tout ce passage n'est qu'une interpolation.

§ 4. Chez qui elle soit immobile. MM. Aubert et Wimmer contestent l'exactitude de cette observation; il semble cependant qu'elle est vraie; et il y a quelques hommes chez qui l'oreille soit mobile à volonté, ces exceptions sont si rares qu'on peut ne pas les compter. - Le conduit auditif. Le texte dit simplement: « Le conduit ». - Tous les volatiles. L'exemple est bien choisi, et il est facilement vérifiable.

§ 5. Tous les vivipares... les mouvoir. Pour tout ce paragraphe, j'ai presque complètement adopté la leçon proposée par MM. Aubert et Wimmer; les manuscrits n'offrent pas de variantes très satisfaisantes, bien qu'elles soient assez nombreuses. - Les espèces de sélaciens. La leçon ordinaire est : « Et tous les animaux qui sont cétacés de cette façon »; c'est-à-dire sans doute, comme le phoque et le dauphin. Mais cette leçon n'est pas acceptable, parce que le phoque est un amphibie et n'est pas un cétacé; le dauphin est un cétacé. Pour les sélaciens, voir plus haut, ch. IV, § 1, et la note. - Et l'homme est le seul... MM. Aubert et Wimmer croient devoir transposer cette phrase avant la précédente. Pour ma part, je ne vois pas d'utilité à ce changement, que n'autorise aucun manuscrit.

§ 6. Dans l'homme. J'ai ajouté ces mots, qui me semblent indispensables. - Dans quelques quadrupèdes. On pourrait dire dans presque tous. - Il y a des oreilles sans poils. La suite prouve qu'il s'agit toujours des oreilles de l'homme, et non pas des oreilles en général. - Annoncent la loquacité et la sottise. On peut douter que ces observations soient parfaitement exactes, parce que le nombre des sujets observés n'est jamais assez grand.

§ 7. Et le sommet de la tête. Maintenant on ne donne plus cette étendue à la tempe; elle se réduit à la partie de la tête comprise entre l'oreille et le front, ou entre l'oreille et l'œil.

§ 8. Qui sert de passage à l'air. Ceci est en effet très exact, en ce que les narines sont toujours ouvertes, tandis que la bouche ne l'est pas toujours. Il est donc plus naturel de prendre le nez pour le passage principal de l'air. - Qu'on aspire et qu'on expire. MM. Aubert et Wimmer font ici une correction purement grammaticale, qui n'a rien de nécessaire. - L'expulsion de l'air accumulé. Cette définition, si elle n'est pas complète, n'a du moins rien de faux. - Parmi les vents de notre corps. Le texte dit simplement : « Des vents ». - Des présages sacrés. Mot à mot : « des présages et quelque chose de sacré ».

§ 9. Se font.... dans la poitrine. Ceci peut corriger ce qui a été dit d'un peu excessif sur la fonction du nez. - Par les narines seules. C'est cependant ce qui paraissait résulter de ce qui a été dit du nez, au paragraphe précédent. - Par le gosier, qui communique à la fois avec les fosses nasales et avec la bouche. - De la respiration du nez. Le texte n’est pas aussi précis; et l'on peut comprendre ce passage d'une manière générale: « Des animaux peuvent vivre sans respirer. »

§ 10. Le uns de l'odorat... la perception de l'odeur. Cette espèce de tautologie n'est pas aussi frappante dans le texte grec; elle est inévitable dans notre langue. - Un diaphragme. Le mot de Diaphragme est pris dans son sens général. - Dans l'éléphant... Tout ceci est exact; mais on ne comprend pas bien qu'on parle ici de l'éléphant, à propos des organes de la tête de l'homme. Voir plus loin, liv. II, ch. 2, § 4, et liv. IX. ch. XXXIII.

§ 11. Le menton... la mâchoire proprement dite. Dans la langue grecque, les deux expressions sont presque identiques; j'ai dû prendre une paraphrase, pour établir, en notre langue, quelque différence entre ces deux parties de la mâchoire inférieure. Peut-être au lieu de : « La mâchoire proprement dite », pourrait-on traduire : « la joue » (Gena, en latin). - Excepté le crocodile de rivière. Cet exemple intervient encore ici bien brusquement; mais du moins il est très concis; voir plus loin sur le crocodile de rivière, liv. III. ch. VII, § 4, où la même phrase est répétée presque identiquement.

§ 12. Le palais et le pharynx. On pourrait distinguer dans la bouche un plus grand nombre de parties; mais ces deux-là sont bien réelles.

§ 13. La perception du goût, ou de la saveur. - Surtout. J'ai ajouté ce mot, que justifie ce qui suit. - Plus large. Le texte dit simplement : Large. - Si elle les sent tout aussi bien que les saveurs. Le texte n'est pas tout à fait aussi précis. MM. Aubert et Wimmer voudraient retrancher cette phrase, parce que le sens du goût, dans toute sa vivacité, n'a été attribué un peu plus haut qu'au bout de la langue. Mais il me semble que ce passage est très acceptable, avec l'interprétation que je donne. - Ou libre ou embarrassée. II semble que ce passage est fort clair et que l'observation est exacte. Aristote ne dit pas que le bégaiement tienne aux dimensions exagérées de la langue, comme le supposent quelques traducteurs; il dit seulement que la lingue est embarrassée (mot à mot, liée) dans le bégaiement et le grasseyement; ce qui est vrai. - Molle, ou poreuse. - L'épiglotte est une partie de la langue. L'étymologie même le dit. L'épiglotte est une espèce de soupape, qui fait, par son mouvement, que les aliments solides et liquides passent du pharynx dans l'œsophage, et ne peuvent pas s'engager dans le larynx et les voies respiratoires, où ils causeraient la suffocation et la mort.

§ 15. L'amygdale. J'ai dû prendre ce mot qui seul est clair dans notre langue anatomique; mais le texte grec emploie un mot métaphorique, qu'on pourrait rendre par l'Isthme de la bouche ; l'image est très juste. Voir plus loin, ch. XIII, § 7. - Double... multipliées. Les deux mots qu'emploie le texte ont une ressemblance étymologique que je n’ai pu faire passer dans ma traduction. Le sens d'ailleurs ne peut être douteux. - Qui a la forme d'un grain de raisin. J'ai paraphrasé le mot grec, qui désigne le voile du palais. - Un pilier. C'est le mot même qu'a conservé l'anatomie moderne. - Le grain. Je n'ai pas trouvé d'expression plus convenable pour désigner cette maladie de la luette qui cause l'étouffement. Le mot grec peut aussi ne signifier que la luette. - Elle étouffe le malade. MM. Aubert et Wimmer croient que ceci est une interpolation.

CHAPITRE X Le cou; sa position; le larynx, l'œsophage; la nuque, derrière du cou ; le tronc et ses diverses parties antérieures, la poitrine, les mamelles, le mamelon; hommes qui ont du lait; le ventre, le nombril; l'abdomen au-dessous du nombril, et l'hypocondre au-dessous; ceinture et rein; parties honteuses de l'homme et de la femme; leurs différences; conduit urétral chez les deux; rôle des parties communes dans le corps; le derrière du tronc; le dos; les huit côtes de chaque côté; récit fabuleux sur des hommes à sept côtés.

§ 1. [5] Le cou est placé entre le visage et le tronc; sa partie supérieure est le larynx, et sa partie postérieure est l'œsophage. La partie du cou, cartilagineuse et antérieure, par où passent la voix et la respiration, s'appelle la trachée-artère. La partie charnue est l'œsophage; elle est située intérieurement, un peu en avant de la colonne dorsale. La partie qui est le derrière du cou s'appelle la nuque. Telles [10] sont les parties du corps jusqu'au tronc.

§ 2. Le tronc lui-même a des parties, dont les unes sont par devant; les autres, par derrière. Parmi les parties antérieures, on distingue la poitrine, qui a deux mamelles; le mamelon est double également; c'est par là que le lait distille chez les femmes. La mamelle est d'une chair molle. Les hommes aussi ont [15] du lait; mais chez l'homme, la chair des mamelles est ferme et dure, tandis que, chez la femme, elle est spongieuse et remplie de pores.

§ 3.  Après le tronc, dans les parties de devant, vient le ventre; le centre ou la racine du ventre, c'est le nombril. Au-dessous de cette racine du ventre, vient le flanc qui est double; la partie au-dessous de l'ombilic ou nombril est simple; et c'est ce qu'on appelle l'abdomen, dont [20] l'extrémité est le pubis. La partie au-dessus du nombril est l'hypocondre. La partie commune à l'hypocondre et au flanc est la cavité qui renferme les intestins.

§ 4. La ceinture dans les parties postérieures est ce qu'on appelle le rein, qui tire son nom de ce qu'il semble être en effet une sorte de rainure. Dans les parties qui servent à l'expulsion des excréments, on distingue d'une part la fesse, qui sert à s'asseoir; et de l'autre, la cavité dans laquelle s'articule et roule la cuisse.

§ 5. Une partie spéciale [25] au sexe femelle, c'est-la matrice; et dans le sexe mâle, c'est la verge, le membre honteux, en dehors du tronc et en bas. La verge a deux parties; son extrémité qui est charnue, toujours sans poil, pour ainsi dire lisse et égale, s'appelle le gland. La peau placée autour du gland n'a pas de nom particulier; et quand on la coupe, elle ne peut plus se rejoindre, non plus que la joue et la paupière. La partie commune à cette peau et au gland est ce qu'on appelle le bourrelet.

§ 6. [30] Le reste de la verge est un cartilage, qui peut se gonfler beaucoup, qui sort et qui rentre, autrement que chez les animaux à queue garnie de crins. Au-dessous du membre honteux, se trouvent les deux testicules; et la peau qui les environne est ce qu'on nomme le scrotum. Les testicules ne sont pas précisément de la chair; mais ils ne sont pas non [494a] plus très éloignés d'en être.

§ 7. Du reste, nous reviendrons plus tard sur toutes ces parties, pour dire avec des détails plus précis quelle en est l'organisation.

§ 8. Les parties honteuses de la femme sont tout le contraire de celles des hommes; elles sont creuses sous le pubis ; et elles ne ressortent pas au dehors comme celles des hommes. L'urètre est en dehors [5] de la matrice; il est destiné à servir de conduit au sperme chez le mâle. D'ailleurs, c'est pour les deux sexes, mâle et femelle, le canal par où sort l'excrément liquide.

§ 9. Une partie commune du cou et de la poitrine, c'est la gorge ; une partie commune du côté, du bras et de l'épaule, c'est l'aisselle; de la cuisse et du bas-ventre, c'est l'aine ; de la cuisse et des fesses, en dedans, c'est le périnée; de la cuisse et [10] des fesses, en dehors, c'est le pli de la fesse.

§ 10. On vient de voir quelles sont les parties du tronc par devant. Le derrière de la poitrine est le dos. Les parties du dos sont les deux omoplates, et l'épine dorsale ou rachis. Les reins sont au-dessous du thorax à l'opposé du ventre. De haut en bas, sont rangées huit côtes de chaque côté. [15]Nous n'avons en effet aucun témoignage de quelque valeur sur les prétendus Ligyens qui n'auraient que sept côtes.

§ 1. Le tronc. Ou, le thorax, pour conserver le mot grec. - L'œsophage. Le texte a le mot d'où nous avons tiré nous-mêmes le mot d'estomac, qui n'a pas le même sens. - Antérieure. C'est bien en effet la position du larynx. - La trachée-artère. Le texte dit simplement : « L'artère »  - La partie charnue. Il n'est peut-être pas très exact de dire que l'œsophage soit charnu; il est plutôt cartilagineux, comme le larynx. - De la colonne dorsale. Ou rachis, pour conserver le mot grec.

§ 2. La poitrine, qui a deux mamelles. Chez les hommes comme chez les femmes, bien que l'organisation soit différente. - Le mamelon est double. Un à chaque mamelle. - Les hommes aussi ont du lait. MM. Aubert et Wimmer ajoutent dans leur traduction : « quelquefois ». Cette restriction peut sembler en effet nécessaire; car le lait chez les hommes est une exception des plus rares; mais je n'ai pas cru pouvoir faire cette addition, qui n'est pas dans le texte. Il faut remarquer qu'Aristote prend ici les termes généraux de mâles et de femelles, et non ceux d'hommes et de femmes: mais il ne faut pas oublier qu'il s'agit du corps humain, et non du corps des animaux. - Remplie de pores. Ou, de vaisseaux.

§ 3. Le centre ou racine du ventre. Le texte dit simplement: « la racine du ventre » D'après deux passages du traité de la Génération des animaux, liv. II, §§, 67 et 113, édition Aubert et Wimmer, pp. 168 et 194, MM. Aubert et Wimmer justifient cette métaphore du mot racine, parce que, selon Aristote, c'est du nombril de la mère que partent, comme d'une racine, les veines qui vont nourrir l'embryon qu'elle a conçu. - Le flanc, ou, la hanche. - Qui est double. Un de chaque côte. - L'abdomen. Il me semble que c'est encore ce mot qui répond le mieux à celui du texte. - Le pubis. Le sens du mot grec n'est pas très distinct; et j'ai pris ce terme général pour ne pas trop préciser les choses. Il peut s'agir aussi des parties génitales. - La cavité qui renferme les intestins. Ici encore, j'ai dû paraphraser plutôt que traduire, parce que le sens du mot grec est tout à fait indécis, et qu'après toutes les parties du ventre qui viennent d'être énumérées. il n'en reste plus auxquelles ce mot puisse être encore appliqué, comme le remarquent MM. Aubert et Wimmer. Le mot se trouve deux fois dans Homère, Iliade, ch. IV, vers 526, et ch. XXI, vers 181, et il ne semble y signaler que les intestins, sortant du ventre d'un guerrier, à la suite d'une blessure profonde dans le nombril.

§ 4. La ceinture. C'est encore le mot que notre langue a conservé. pour exprimer cette partie du corps qui est au-dessus des hanches. Seulement, le mot de ceinture s'applique aux parties de devant aussi bien qu'à celles de derrière, tandis que le mot grec ne s'applique qu'a ces derrières. - Le rein... rainure. J'ai essayé de reproduire en notre langue l'espèce de jeu de mots qui se trouve dans le grec, et qui ne paraît pas être beaucoup plus sérieux que celui que je risque. L'explication étymologique ne semble pas très exacte. Au lieu de dire les reins, on pourrait dire aussi les lombes. - Qui sert à s'asseoir. C'est une paraphrase du mot du texte. - La cavité. Ou, cotylédon.

§ 5. La verge, le membre honteux. Il n'y a que ce dernier mot dans le grec; j'ai cru devoir ajouter le précédent. qui est le terme médical et anatomique. - Du tronc. Ou, le thorax, comme plus haut. - Toujours sans poil. Les manuscrits donnent des variantes, dont la plus acceptable me semble être celle que j'ai adoptée. - Lisse et égale. Même remarque. - Le gland. Notre langue a conservé cette métaphore empruntée à la langue grecque. - N'a pas de nom particulier. Dans notre langue anatomique, le nom particulier de cette peau est le prépuce.  - Ne peut plus se rejoindre. Aristote semble donc avoir connu l'excision du prépuce, la circoncision. - Non plus que la joue et la paupière. Ceci ne se comprend pas bien, surtout pour la joue, où la cicatrisation se fait très aisément. - Le bourrelet. C'est le terme anatomique. Le mot grec n'est pas plus spécial.

§ 6. Que chez les animaux à queue garnie de crins. Le sens a paru obscur à plusieurs traducteurs; il me semble au contraire très clair. La verge chez l'homme ne rentre pas et ne se cache pas, comme chez le cheval ou l'âne, animaux à queue de crins; seulement elle se gonfle, ou se dégonfle, sans disparaître. Évidemment, c'est là ce qu'Aristote a voulu dire. Voir plus haut, ch. II, § 3. - Le Scrotum. Ou les bourses. - Très éloignés d'en être. C'est en effet une organisation toute spéciale, et un tissu différent de tous les autres. § 7. Plus tard. Voir plus loin. liv. III, ch. I, § 1.

§ 8. Sous le pubis. Le mot grec a quelque chose encore de plus précis.

§ 9. Une partie commune... c'est le pli de la fesse. Je ne suis pas sûr d'avoir identifié très exactement tous les termes dont se sert ici Aristote. Les parties du corps dont il parle dans ce passage, ne sont pas elles-mêmes très bien déterminées.

§ 10. Du tronc de la poitrine. Le texte fait aussi cette distinction. - Ou rachis. Il n'y a que ce seul mot dans le texte. - Les reins, ou lombes. On peut trouver que toutes ces descriptions ne sont pas assez précises; mais je ne vois pas que l'anatomie moderne ait fait mieux; et cette indécision tient à la nature même des choses. - Huit côtes. Il est difficile de s'expliquer cette erreur sur le nombre des côtes, qui semble si facile à vérifier sur le squelette. Les côtes sont au nombre de douze de chaque côté, dont cinq sont appelées fausses côtes. Voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 74. Peut-être Aristote les a-t-il réunies en une seule, et il arrive ainsi au total de huit de chaque côté. - Ligyens. II est difficile de savoir de quel peuple il s'agit ici. Schneider, tome III, p. 43, paraît croire que ce sont les peuples de Ligurie dont Aristote veut parler.

CHAPITRE XI Parties du corps de l'homme, supérieures, inférieures, antérieures postérieures, gauches droites; rapports de ces parties ; les droites sont en général plus fortes; membres supérieurs, les bras; la main, les doigts; leur flexion; intérieur et dehors de la main; le poignet; membres inférieurs, la cuisse, la rotule, la jambe; la cheville; le pied, ses os; dessus et dessous du pied; les ongles; le genou; signes à tirer de la conformation du pied et de la main.

§ 1. On distingue dans le corps de l'homme le haut et le bas, le devant et le derrière, la droite et la gauche. Les parties de gauche et de droite sont presque pareilles, dans les parties qui les composent, et elles sont toutes [20] les mêmes, si ce n'est que les parties gauches sont plus faibles. Mais les parties de derrière ne ressemblent pas à celles de devant; les parties d'en bas ne ressemblent pas à celles d'en haut. La seule ressemblance des parties placées au-dessous de l'hypogastre avec le visage, c'est qu'elles sont charnues ou maigres, comme il l'est lui-même; les jambes sont dans le même rapport avec les bras. Quand on a les bras courts, les cuisses sont également courtes d'ordinaire; [25] si l'on a de petits pieds, on a aussi de petites mains.

§ 2. En fait de membres, l'homme a deux bras; et chaque bras comprend l'épaule, le haut du bras, le coude ou olécrâne, l'avant-bras et la main.

§ 3. Dans la main, on distingue la paume, et les doigts au nombre de cinq; dans les doigts, on distingue encore la partie qui peut fléchir, l'articulation; et celle qui ne fléchit pas, la phalange. Le gros doigt, le pouce, n'a qu'une articulation; [30] les autres en ont deux. La flexion d'ailleurs se fait toujours en dedans, aussi bien pour le bras que pour les doigts. C'est au coude que se fait la flexion du bras. L'intérieur de la main, la paume, est charnu; et elle est partagée par plusieurs raies. Chez ceux qui doivent vivre longtemps, [494b] une ou deux de ces raies traversent toute la main; chez ceux dont la vie doit être courte, il y a deux raies, qui ne traversent pas la main entière.

§ 4. L'articulation de la main et du bras est le poignet, ou carpe ; le dessus de la main est composé de muscles et n'a pas reçu de nom spécial.

§ 5. Le membre autre que le bras est également double; c'est la jambe. On distingue, dans la jambe, [5] la cuisse, ou fémur, qui a deux têtes; la rotule qui a un siège mobile ; et la jambe proprement dite, qui a deux os. La partie antérieure de la jambe est le devant de la jambe; la partie postérieure est le gras de la jambe, qui est une chair pleine de muscles ou de veines. Tantôt cette partie est très relevée vers le jarret, chez ceux qui ont des fesses volumineuses; chez ceux qui ont au contraire de petites fesses, elle est plutôt abaissée.

§ 6. L'extrémité du devant de la jambe [10] est la cheville, qui est double à chaque jambe.

§ 7. Dans la jambe, c'est le pied qui a le plus grand nombre d'os. La partie postérieure du pied est le talon; la partie antérieure est divisée en cinq doigts. Le dessous du pied, ou poitrine du pied, est charnu; le dessus du pied, dans les parties supérieures, est musculeux, et il n'a pas de nom spécial.

§ 8. Dans chaque doigt du pied, on distingue [15] l'ongle et la jointure; l'ongle n'est jamais qu'à l'extrémité du doigt; et tous les doigts n'ont de flexion qu'en dedans.

§ 9. Quand on a l'intérieur du pied plein et non creux, et qu'on marche en l'appliquant tout entier, c'est un signe qu'on est rusé et capable de tout.

§ 10. Le genou et sa flexion appartiennent à la fois à la cuisse et à la jambe.  

§ 1. Dans le corps de l'homme. Ceci n'est pas particulier au corps de l'homme; et l'on peut faire les mêmes distinctions pour la plupart des animaux, surtout les animaux supérieurs. - Dans les parties qui les composent. Ces parties sont les membres pareils et en nombre égal de chaque côté. - Plus faibles. Ceci est parfaitement exact; et chacun de nous peut le savoir par sa propre expérience. Dans notre langue, le mot de gauche signifie aussi maladroit. - Au-dessous de l'hypogastre. C'est la partie du ventre au-dessous du nombril et comprise entre les hanches. - Comme il l'est lui-même. Le texte n'est pas aussi précis. - Les jambes... Même remarque. Il ne semble pas d'ailleurs que le sens puisse faire de doute. - Si l'on a de petits pieds... Cette observation est exacte, si l'on regarde à la constitution originelle; mais l'exercice des mains, et les fatigues qu'on leur donne, les grossissent beaucoup, sans que les pieds se développent dans la même proportion. Toutes ces distinctions sont d'ailleurs indispensables pour bien faire comprendre les descriptions que le naturaliste peut avoir à faire, et l'anatomie moderne a dû les conserver.

§ 2. Le coude ou olécrâne. II n'y a que ce dernier mot dans le texte. Je ne sais pas si l'on peut dire précisément que l'olécrane est une partie du bras, puisque ce n'est qu'une apophyse d'un os, le cubitus; mais c'est une partie de cet os très notable, à cause de sa protubérance. - L'avant-bras. C'est la partie qui s'étend du coude au poignet, et qui a deux os, le cubitus et le radius, tandis que le haut du bras n'a que l'humérus.

§ 3. La paume. Ou, l'intérieur de la main. L'anatomie moderne distingue trois parties dans la main : le carpe, le métacarpe et les doigts. C'est l'ostéologie qui exige ces distinctions. - La phalange. C'est le mot que l'anatomie moderne a conservé : phalanges, phalangines, phalangettes, expriment les trois espèces d'os qui composent chaque doigt, dans le métacarpe. Le pouce n'en a que deux. - Le gros doigt, le pouce. Le texte n'a qu'un seul mot. - N'a qu'une articulation. Aristote ne compte pas l'articulation qui joint le pouce au métacarpe ; il ne la compte pas davantage pour les autres doigts, puisqu'il ne leur donne que deux articulations. - En dedans. Autrement, la préhension n'aurait pas été possible. - Au coude. Le texte dit précisément : Olécrane. - Par plusieurs raies. Le mot grec est plus vague, et il signifie d'une manière générale membres, membrures. - Chez ceux qui doivent vivre. C'est là le fondement de la chiromancie; elle est fort ancienne, comme on voit; mais elle n'en est pas pour cela une science plus solide.

§ 4. Le poignet, ou carpe. Le texte n'a que le dernier mot. - Le dessus de la main. Le texte dit précisément : le dehors. Il n'y a pas non plus de nom spécial dans notre langue, à moins qu'on ne veuille prendre celui de métacarpe pour le dos de la main exclusivement. Quant aux muscles, l'expression grecque peut tout aussi bien signifier les nerfs, et même les tendons.

§ 5. Le membre autre que le bras. Le mot qui correspond dans le texte à celui de membre a, dans le grec, une étendue plus grande que notre mot de membre. - La cuisse ou fémur. II n'y a qu'un seul mot dans le texte; j'ai ajouté le synonyme de fémur, à cause de ce qui suit. L'os de la cuisse, le fémur proprement dit, a, en effet, deux têtes; on pourrait même aller jusqu'à trois : la tête du fémur, le grand trochanter et le petit trochanter. Ces trois proéminences sont dans la partie supérieure, où le fémur s'insère à la cavité cotyloïde; à la partie inférieure, il y a aussi deux tubérosités, qui sont peut-être les deux seules dont Aristote veut parler. - Qui a un siège mobile. C'est la traduction littérale du mot grec. - La jambe proprement dite. J'ai ajouté ces derniers mots, parce que la jambe se prend aussi pour le membre entier, composé de la cuisse et de la jambe inférieure. - Le devant de la jambe... le gras de la jambe. La langue grecque a des mots spéciaux que n'a pas la nôtre. - De muscles, et de nerfs aussi; mais Aristote ne distingue pas les muscles et les nerfs. -  Ou de veines. II semble que la conjonction et aurait été plus convenable. - Des fesses volumineuses. L'observation est curieuse; mais elle n'est peut-être pas très exacte.

§ 6. La cheville. Cette définition est très imparfaite en ce que la cheville est l'une en dedans, l'autre en dehors, et ne fait pas partie du devant dé la jambe. Ce qu'on appelle la cheville dans le langage vulgaire, n'est qu'une protubérance, sur chaque jambe, du tibia pour la malléole interne, et du péroné pour la malléole externe. Il ne semble pas qu'Aristote ait connu cette disposition des os, d'après la définition qu'il donne de la cheville; mais cette définition est trop vague pour qu'on puisse dire qu'il se soit complètement mépris sur la nature de la cheville, en ayant l'air d'en faire un os à part. Voir plus loin, ch. XII, § 4.

§ 7. Le plus grand nombre d'os. Le texte dit simplement : » « Un grand nombre d'os »; mais il me semble que, dans la tournure de la phrase, il y a une nuance de comparaison, que j'ai tâché de reproduire. Les os du pied sont en effet très nombreux; il y en a sept dans le tarse; le métatarse en a cinq; les orteils en ont treize, sans compter les os sésamoïdes. - Ou poitrine du pied. J'ai hasardé cette expression, qui reproduit textuellement le mot grec. Nous disons la plante du pied. - Et n'a pas de nom spécial. Dans notre langue non plus, il n'y a pas de mot spécial; et nous sommes forcés de prendre une circonlocution en disant : «Le cou de pied ». C'est la face supérieure et dorsale du métatarse.

§ 8. Dans chaque doigt. Le texte dit simplement : « Dans le doigt ». Pour le doigt du pied, le mot propre est l'Orteil. - Qu'en dedans. Ainsi que la main.

§ 9. Plein. Le texte dit : Épais. - C'est un signe. Il est assez difficile de comprendre comment cette observation se lie à ce qui précède, ou à ce qui suit. C'est peut-être une interpolation, comme plusieurs observations du même genre qu'on a trouvées plus haut. Il semble que c'est une pensée physiognomonique qui suit son cours, au travers d'autres pensées tout à fait étrangères. Ce sont peut-être aussi des additions que l'auteur aura faites après coup.

§ 10. Le genou et sa flexion. L'articulation du genou comprend dans sa totalité trois os, le fémur, le tibia et la rotule; plus, des tendons, des ligaments au nombre de trois, et des fibres ligamenteuses, qui se rendent à des cartilages. - A la cuisse et à la jambe. Puisqu'en effet l'articulation du genou est faite pour unir la jambe et la cuisse.

CHAPITRE XII Positions des parties; en haut, en bas, devant et derrière, droite et gauche correspondent dans l'homme à ces positions dans l'univers; privilège de l'homme; position particulière de la tête dans le corps humain; retour sur les parties diverses qui le composent, depuis le cou jusqu'aux pieds; correspondance des flexions des bras et des jambes; sens et organes des sens placés en avant; oreilles et ouïe placées sur le côté; écartement des yeux; le toucher est le sens le plus développé, puis le goût; infériorité de l'homme pour les autres sens.

§ 1. Toutes les parties que nous venons d'énumérer sont communes au mâle et à la femelle. [20] La position de toutes ces parties en haut et en bas, en avant et en arrière, à droite et à gauche, est de toute évidence ; et l'observation la plus simple nous fait connaître celles qui sont extérieures. Nous devons néanmoins en parler, par la même raison qui nous a porté à nous occuper de tout ce qui précède, afin que ce qui va suivre soit plus complet; et nous comptons ainsi les parties, [25] afin d'être moins exposé à oublier celles qui ne sont pas disposées chez le reste des animaux de la même façon que chez l'homme.

§ 2. C'est dans l'homme que les parties du haut et du bas se rapprochent plus directement que chez tous les autres animaux des lieux qui, dans la nature, indiquent le haut et le bas. Dans l'homme en effet [30] le haut et le bas sont en rapport étroit avec le haut et le bas de l'univers; chez lui encore, le devant et le derrière, la droite et la gauche sont selon l'ordre naturel. Quant aux autres animaux, ils n'ont pas ces distinctions; ou s'ils les ont, elles sont en eux bien plus confuses.

§ 3. Par exemple, tous les animaux ont la tête en haut relativement à leur corps; mais l'homme est le seul, ainsi qu'on l'a dit, qui, dans sa perfection, [495a] ait cette partie en rapport avec l'axe du monde.

§ 4. Après la tête, vient le cou ; et ensuite, la poitrine et le dos : l'une en avant, et l'autre par derrière. A ces parties, succèdent continûment le ventre, le pubis, les parties honteuses, le siège : puis encore, la cuisse et la jambe, et enfin les pieds. Les [5] jambes ont aussi la flexion en avant, sens où se fait également la marche, et où les pieds sont les plus mobiles et ont leur flexion. Le talon est le derrière du pied; et de chacun des deux côtés, sont placées les chevilles.

§ 5. Sur les côtés du corps, à droite et à gauche, sont les bras, qui ont leur flexion en dedans, de telle sorte que [10] les parties convexes des jambes et des bras se correspondent dans l'homme le plus complètement possible.

§ 6. Les sens et leurs organes, les yeux, le nez, la langue sont chez l'homme placés du même côté, c'est-à-dire en avant. L'ouïe, et son organe, les oreilles, sont placés de côté, mais sur la même ligne circulaire que les yeux. L'écartement des yeux est dans l'homme, comparativement à sa grandeur, moindre que chez tous les autres animaux. Le sens le plus développé chez l'homme, c'est le toucher; et en second lieu, le goût. Pour les autres sens, il est inférieur à bien des animaux.

§ 1. Au mâle et à la femelle. J'ai conservé cette formule, qui est dans le texte, et qui semble convenir plus particulièrement à l'histoire naturelle; Aristote, s'il l'avait voulu, aurait pu dire comme nous : « A l'homme et à la femme ». - En haut, en bas. Voir ch. XI, § I. - Nous devons néanmoins. Ces détails complètent l'exposé de la méthode générale d'Aristote. - Nous comptons ainsi les parties. Le texte n'est peut-être pas tout à fait aussi net; et la tournure grammaticale dans le grec n'est pas très régulière.

§ 2. C'est dans l'homme... qui dans la nature. II semble bien qui Aristote a voulu dire que le haut et le bas dans l'homme est le même que le haut et le bas dans la nature et dans le monde. C'est déjà la même pensée qui se retrouvera plus tard dans les fameux vers d'Ovide : « Os sublime.... ad sidera tollere vultus ». Les animaux autres que l'homme ont le haut de leur corps tourné vers le bas, puisque tous regardent la terre. Voir le paragraphe suivant. - De l'univers. Le texte dit mot à mot : « Du tout ». - Selon l'ordre naturel. Le haut étant donné, toutes les autres directions s'ensuivent nécessairement. - Quant aux autres animaux. C'est en effet une différence considérable entre l'homme et les animaux, bien que ce ne soit pas la plus importante. - Bien plus confuses. Ceci regarderait plus particulièrement les animaux les moins formés, et que nos naturalistes modernes appellent les protozoaires.

§ 3. Ainsi qu'on l'a dit. Le texte est aussi vague, et l'on ne peut savoir si c'est une opinion personnelle d'Aristote et qu'il répète, ou si c'est une opinion étrangère qu'il signale et qu'il adopte. - Dans sa perfection. Je préfère ce sens à celui qu'ont généralement adopté les traducteurs : « Quand il est complet, quand il est arrivé à son développement parfait ». - Avec l'axe du monde. Le texte n'est pas aussi précis. Le mot d'axe y est remplacé par un simple pronom neutre.

§ 4. Le siège. J'ai pris ce terme très général pour exprimer le derrière, les fesses; peut-être vaudrait-il mieux dire: la hanche, puisqu'il s'agit ici des parties antérieures du corps. Le mot du texte peut avoir les deux sens. - Et ont leur flexion. Ceci n'est peut-être pas très exact. Le pied, en se relevant vers la jambe, a un mouvement en arrière assez prononcé. - De chacun des deux côtés. J'ai adopté la variante proposée par MM. Aubert et Wimmer, le texte ordinaire n'ayant pas de sens. - Les chevilles. Voir plus haut, ch. XI, § 6. § 5. En dedans. Pour que ce qui suit soit exact, il faut comprendre que les bras se replient sur eux-mêmes, comme les jambes se replient également sur elles-mêmes. - Les parties convexes. Ceci n'est pas assez clairement exprimé.

§ 6. Les yeux, le nez, la langue. II n'y a là que trois sens; les autres sont énumérés plus bas. -  Circulaire. J'ai ajouté ce mot, pour rendre toute la force du mot grec. - L'écartement des yeux. Cette observation est sans doute exacte. Mais je ne crois pas qu'on ait repris l'étude de ce fait dans la physiologie moderne. - Le plus développé. Le texte dit mot à mot: « Le plus exact ». - II est inférieur à bien des animaux. Cette observation, d'ailleurs fort juste, est faite ici sans doute pour la première fois. Aujourd'hui, elle est banale.

CHAPITRE XIII Parties intérieures du corps humain; description du cerveau; les méninges; l'homme est l'animal qui a l'encéphale le plus développé ; chez l'homme, l'encéphale est double; le cervelet; volume de la tête; l'encéphale n'a pas de sang ; l'os de la fontanelle est le plus mince de toute la tête ; rapports de l'œil avec l'encéphale; parties intérieures du cou; la trachée-artère; sa place, sa nature, sa communication avec le nez; l'épiglotte; description du poumon; ramifications de la trachée-artère; description du cœur ; ses rapports avec la trachée-artère; description de l'œsophage, de l'estomac, des intestins; l'épiploon ; le mésentère.

§ 1. Les parties du corps humain qu'on distingue extérieurement, à première vue, [20] sont disposées comme on vient de le dire ; ce sont elles qui sont le plus ordinairement nommées, et qui sont les plus connues, par suite de l'habitude où l'on est de les voir. Les parties intérieures sont tout le contraire; car ce sont ces parties-là qui, pour l'homme, sont les moins connues. Aussi doit-on, en y rapportant les parties des autres animaux, savoir quelles sont celles dont elles se rapprochent le plus naturellement.

§ 2. Tout d'abord dans la tête [25] se trouve le cerveau, l'encéphale, placé dans la partie antérieure. Du reste, il en est de même dans tous les autres animaux qui sont pourvus de cet organe; et ces animaux-là sont tous ceux qui ont du sang, et aussi les mollusques.

§ 3. Proportionnellement, c'est l'homme qui a le cerveau le plus gros et le plus humide. Deux membranes l'enveloppent : l'une [30] plus solide, du côté de l'os; l'autre, posée sur le cerveau lui-même, est plus faible que la première.

§ 4. Chez tous les animaux, l'encéphale est double; et après le cerveau, vient, à la dernière place, ce qu'on appelle le cervelet, qui a une composition tout autre, soit au toucher, soit à la vue. Le derrière de la tête dans tous les animaux est vide et creux, variant selon la grosseur [495b] de chacun d'eux. Certains animaux ont la tête fort grosse, tandis que la partie inférieure de leur face est petite ; et ce sont tous ceux qui ont la face ronde. D'autres ont la tête petite, et de longues mâchoires; et tous les animaux à queue garnie de crins ont cette conformation.

§ 5. L'encéphale n'a pas de sang [5] chez aucun animal; et dans sa masse, il n'a point de veines. Quand on le touche, il est naturellement froid. Dans presque tous les animaux, il a un petit creux dans son centre ; et la méninge qui l'enveloppe est sillonnée de vaisseaux. La méninge qui enveloppe le cerveau est une membrane dans le genre de la peau. Au-dessus du cerveau, est la fontanelle, [10] qui est l'os le plus mince et le plus faible de toute la tête.

§ 6. De l'œil, trois conduits se rendent à l'encéphale ; le plus grand et le moyen vont jusqu'au cervelet; et le plus petit va dans le cerveau même; le plus petit conduit est le plus rapproché du nez. Les deux plus grands dans l'un et l'autre œil sont parallèles [15], et ne se rencontrent pas. Les conduits moyens se rejoignent, disposition qu'on remarque surtout chez les poissons; car ces conduits moyens sont plus près du cerveau que les grands conduits. Les plus petits conduits s'éloignent le plus complètement l'un de l'autre, et ne se touchent jamais.

§ 7. Au dedans du cou, se trouve l'organe appelé l'œsophage, l'isthme, qui tire son nom [20] de sa longueur et de son étroitesse. Là aussi, se trouve la trachée-artère. Dans tous les animaux qui ont une trachée, cette artère est placée en avant de l'œsophage ; et la trachée-artère existe dans les animaux qui ont aussi des poumons. La trachée-artère est un cartilage, qui, par sa nature, a peu de sang, bien qu'elle soit entourée d'un grand nombre de petites veines. Elle est placée dans [25] la partie supérieure de la bouche, à la communication de la bouche et du nez, de telle sorte que, quand en buvant on y attire une partie du liquide, c'est par cette communication qu'il ressort de la bouche dans les narines.

§ 8. Entre ces ouvertures, la trachée a cet organe qu'on nomme l'épiglotte, destinée à recouvrir l'ouverture de la trachée-artère, qui se rend [30] à la bouche. L'extrémité de la langue se rattache à la trachée, qui, de chaque côté, descend jusqu'entre les deux poumons; et de là, elle se partage dans chacune des deux parties dont le poumon se compose.

§ 9. Dans tous les animaux qui ont un poumon, il tend toujours à être divisé en deux parties. Dans les vivipares, cette division n'est pas toujours pareillement sensible; et c'est chez l'homme qu'elle l'est [496a] le moins. Chez lui, le poumon n'a pas plusieurs lamelles, comme dans quelques vivipares; il n'est pas uni; mais il a des inégalités.

§ 10. Dans les ovipares, tels que les oiseaux; et dans les quadrupèdes ovipares, chacune des deux parties sont très séparées l'une de l'autre, et l'on dirait [5] qu'il y a deux poumons. De la trachée, qui est unique, sortent deux canaux qui se rendent dans chacune des deux parties du poumon. Elle se rattache aussi à la grande veine (cave), et à ce qu'on appelle l'aorte. Quand on souffle dans la trachée-artère, le souffle se répand dans toutes les cavités du poumon. Ces cavités ont des cellules cartilagineuses, qui se réunissent en pointe; [10] et de ces cellules, partent des trous qui traversent toute l'étendue du poumon; et de plus petites cellules succèdent à de plus grandes.

§ 11. Le cœur se rattache aussi à la trachée-artère par des ligaments, graisseux, cartilagineux et fibreux; et là où le cœur se rattache à l'artère, il est creux. Si l'on souffle dans l'artère, on voit le vent passer dans le cœur, où il entre. Chez quelques animaux, [15] le phénomène n'est pas très-sensible; mais sur des animaux plus grands, il devient de toute évidence.

§ 12. Telle est donc la fonction de la trachée-artère; cette fonction consiste uniquement à recevoir l'air et à le rejeter, sans que la trachée-artère puisse recevoir ou renvoyer quoi que ce soit d'autre, ou solide ou liquide; dans ce dernier cas, on souffre jusqu'à ce qu'en toussant on ait rejeté le corps qui y était descendu.

§ 13. L'œsophage est rattaché [20] par en haut à la bouche ; il côtoie la trachée-artère ; et il y est soudé, ainsi qu'à la colonne vertébrale, par des ligaments membraneux. Après avoir traversé le diaphragme, il finit à l'estomac. II est de nature charnue ; et il est tendu dans sa longueur et sa largeur.

§ 14. L'estomac de l'homme ressemble à celui du chien; il n'est pas [25] beaucoup plus grand que l'intestin; et l'on dirait que c'est un intestin un peu plus large. Puis vient l'intestin simple, qui est enroulé, et qui est de largeur ordinaire. L'estomac inférieur ressemble à celui du porc ; il est large; et la partie qui va de l'estomac au siège est épaisse et courte.

§ 15. L'épiploon est suspendu au milieu du ventre. [30] Il est de sa nature une membrane graisseuse chez l'homme, aussi bien que dans tous les autres animaux qui n'ont qu'un seul estomac, et qui ont les deux rangées de dents.

§ 16. Sur les intestins, est le mésentère ; il est membraneux, large et gras. Il part de la grande veine et de l'aorte ; il est sillonné de veines [496b] nombreuses et épaisses, qui s'étendent le long des intestins, et qui, commençant en haut, descendent jusqu'au bas.

§ 17. Telle est donc l'organisation de l'œsophage ou estomac, de la trachée-artère et du ventre.

 

§ 1. Sont les moins connues. Ceci était très vrai chez les Anciens plus encore que chez nous. Comme on sacrifiait beaucoup d'animaux et qu'on devait les ouvrir très fréquemment, on connaissait leurs viscères bien mieux que nos viscères. Les dissections sur les cadavres humains étaient rares; mais cependant elles ne l'étaient pas autant qu'on l'a cru; et les ouvrages seuls d'Aristote suffiraient à le prouver. A les lire, on ne peut douter qu'il n'ait beaucoup pratiqué l'anatomie. Voir ci-dessus la Préface.

§ 2. Le cerveau, l'encéphale. Il n'y a que ce dernier mot dans le texte. J'ai mis les deux dans ma traduction, pour revenir à la terminologie grecque. On pourrait traduire aussi : «Tout d'abord se présente l'encéphale, qui a son siège dans la partie antérieure de la tête ». - Qui ont du sang. Nous dirions: « qui ont du sang rouge ». - Et aussi les mollusques. Il est bien probable que ceci est une interpolation; car on ne comprend pas comment Aristote aurait pu attribuer un cerveau aux mollusques, et surtout un cerveau placé sur le devant de la tête. Ce qu'on appelle aujourd'hui le cerveau dans les mollusques n'est que la principale masse médullaire qu'ils présentent; et elle est située en travers sur l'œsophage ; voir Cuvier, Règne animal, tome III, p. 2. Ce sont plutôt des ganglions cérébraux qu'un cerveau proprement dit; voir le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 669.

§ 3. Le plus gros. Ceci est exact d'une manière générale ; et Cuvier dit, Règne animal, tome 1, p. 12, « qu'aucun quadrupède n'approche de l'homme pour la grandeur et les replis des hémisphères du cerveau. » Voir aussi le Traité de Zoologie de M. Claus, p. 1093. Quelques naturalistes modernes ont trouvé que la masse encéphalique était encore plus grande chez quelques singes et quelques oiseaux qu'elle ne l'est chez l'homme; mais ces observations sont douteuses; et l'on peut toujours admettre le principe d'Aristote. - Et le plus humide. Ceci ne paraît pas aussi exact. - Deux membranes. Aujourd'hui, l'anatomie distingue trois membranes et non deux, pour le centre céphalo-rachidien : la dure-mère, fibreuse et très résistante, qui est l'enveloppe la plus externe; l'arachnoïde, séreuse, qui tapisse toute la face interne de la dure-mère ; et la pie-mère, qui tapisse le cerveau à l'intérieur et qui pénètre dans les ventricules. D'ailleurs, les descriptions d'Aristote, quoiqu'incomplètes, ne sont pas fausses. Ces trois membranes se nomment des méninges.

§ 4. Chez toux les animaux. II faut entendre ceci avec quelque restriction; il ne s'agit évidemment que des animaux qui ont un cerveau. - L'Encéphale, pris dans son sens le plus large comme remplissant toute la boite crânienne. - A la dernière place. Et sous le cerveau proprement dit. - Une composition tout autre. Ce serait plutôt la Disposition ; car le cervelet est composé, comme le cerveau, de matière grise et de matière blanche. - Est vide et creux. Il n'est pas facile de voir quelle est ici la pensée d'Aristote, et à quel fait anatomique se rapporte cette observation. Il n'y a rien de vide, dans le crâne, que les scissures qui séparent ses diverses parties ;  mais ce n'est pas là sans doute ce qu'Aristote a voulu dire. Peut-être veut-il indiquer l'espace qui sépare le cervelet de la moelle épinière. Il est d'ailleurs évident qu'il s'agit ici non pas de tous les animaux en général, mais des quadrupèdes et des animaux les plus élevés. - A queue garnie de crins. Ceci est vrai du cheval, de l'âne, du mulet et de bien d'autres. La tête n'est pas précisément petite; c'est plutôt le crâne qui est petit; mais les mâchoires sont très longues.

§ 5. L'encéphale n'a pas de sang. Ceci n'est pas exact; il y a beaucoup de veines dans le cerveau; mais Aristote veut dire sans doute que la masse encéphalique elle-même n'est pas sanguine; ce qui est vrai. - Dans sa masse, il n'a point de veines. Probablement, Aristote comprend qu'il n'y a pas de veines qui pénètrent profondément dans la masse encéphalique; car la plus simple inspection démontre, comme Aristote le dit plus bas, que la surface est tapissée d'une foule de veines plus ou moins grosses. - Un petit creux dans son centre. Il est à croire qu'il s'agit ici du ventricule du corps calleux. - Est sillonnée de vaisseaux. Le texte dit simplement : « est veineuse ». - Qui enveloppe le cerveau. On ne parle ici que d'une seule membrane, tandis que plus haut on a parlé de deux; ce qui était plus exact, sans l'être entièrement. - La fontanelle. J'ai cru pouvoir prendre ce mot pour rendre le mot grec, dont le sens n'est pas très précis. Sur l'enfant qui vient de naître, les sutures des os du crâne ne sont pas encore complètes; il y a entre elles, soit à l'occiput, soit au milieu de la tête, soit sur le devant, des intervalles membraneux auxquels on donne le nom de fontanelles (occipitale, suture antéropostérieure, fontanelle antérieure) La fontanelle antérieure, placée presque au-dessus du front, est la plus grande; on l'appelle aussi du mot grec la fontanelle bregmatique. - L'os le plus mince. Au moment de la naissance, c'est plutôt une membrane qu'un os.

§ 6. Trois conduits. Le mot grec que je dois rendre par conduits, a un sens très vague, et il peut désigner des nerfs et des filaments tout aussi bien que des canaux proprement dits. Il est d'ailleurs évident que la description donnée ici par Aristote est fausse; et il est impossible de savoir précisément à quels faits anatomiques elle se rapporte. Il n'y a rien dans le cerveau qui ressemble à ces trois conduits, partant de l'œil ou plutôt de chaque œil, pour se rendre dans le cerveau et même jusqu'au cervelet. Les nerfs optiques peuvent bien donner cette apparence, et on peut les prendre pour les grands conduits; mais il reste toujours les conduits moyens et les petits conduits. - Le plus rapproché du nez. On pourrait croire qu'il s'agit des conduits lacrymaux, qui tiennent en effet au sac lacrymal et au canal nasal; mais ces conduits ne pénètrent pas dans le cerveau, comme le dit Aristote. - Les deux plus grands. On pourrait appliquer encore ceci aux nerfs optiques; mais les nerfs optiques ne sont pas parallèles, et ils s'entrecroisent à un point qu'on appelle leur chiasma. - Disposition qu'on remarque surtout chez les poissons. Ce rapprochement emprunté à l'ordre des poissons n'éclaircit pas ces obscurités. Il faut sans doute renoncer à les expliquer scientifiquement. On ne doit pas s'en étonner; l'anatomie du cerveau est si délicate et si complexe qu'aujourd'hui même on est loin d'être fixé et d'accord sur tous les points.

§ 7. L'Isthme. J'ai conservé ce mot à cause de ce qui suit, et parce qu'il se trouve dans quelques manuscrits, que plusieurs éditeurs ont suivis. La métaphore d'ailleurs est assez exacte, et la science l'a conservée. - La trachée-artère. Le texte dit simplement l'artère. La trachée-artère n'est pas une artère; c'est le canal cartilagineux qui, allant du larynx aux bronches, conduit l'air aux poumons. - En avant de l'œsophage. C'est-à-dire que la trachée-artère est moins près de la colonne vertébrale que l'œsophage, qui l'en sépare; à regarder de la poitrine à l'intérieur, c'est l’œsophage évidemment qui est après la trachée-artère. - Qui ont aussi des poumons. C'est la trachée-artère qui porte l'air extérieur aux poumons, par l'intermédiaire des bronches, qui en sont la bifurcation. - Dans la partie supérieure de la bouche. Cette description est juste, bien qu'elle soit un peu vague. - Que quand en buvant. Il n'est personne qui n'ait éprouvé quelquefois ce petit accident, qui fait assez clairement comprendre quelle doit être l'organisation intérieure.

§ 8. Entre ces ouvertures. Ceci n'est pas non plus très exact. Une anatomie plus avancée ne rattache pas l'épiglotte à la trachée-artère, qui est beaucoup plus bas, mais au larynx, à la partie supérieure duquel l'épiglotte est placée. - L'ouverture de la trachée-artère. C'est l'ouverture du larynx qu'il faudrait dire. - L'extrémité de la langue. Cette description est encore inexacte; et elle supprime toute l'organisation du larynx, qui se trouve entre le fond de la bouche et la trachée-artère. - Elle se partage. Ceci est exact, et l'on reconnaît les bronches, qui sont en effet les deux parties de la trachée-artère, se rendant aux poumons pour y porter l'air extérieur. Ceci sera répété un peu plus bas, § 10, pour les ovipares.

§ 9. C'est chez L'homme qu'elle l'est le moins. La distinction des deux poumons est cependant bien frappante chez l'homme; et il ne semble pas qu'elle le soit davantage chez la plus grande partie des vivipares. - Dans quelques vivipares. II aurait fallu citer précisément quelques vivipares, pour rendre la comparaison plus claire. - Des inégalités. Peut-être s'agit-il des lobes de chaque poumon, deux lobes du poumon gauche et trois lobes du poumon droit. D'ailleurs, le tissu propre du poumon est très compliqué. MM. Aubert et Wimmer croient que ce passage est une interpolation, parce que les assertions d'Aristote sont ici en contradiction trop complète avec les faits les plus évidents.

§ 10. Les quadrupèdes ovipares. Les lézards, et en général les sauriens. Les poumons des oiseaux sont organisés aussi d'une façon toute particulière. Dans les serpents, un des deux poumons disparaît presque entièrement, à cause de la forme même du corps. - De la trachée, qui est unique. Comme dans les vertébrés et les animaux supérieurs. - Sortent deux canaux. Ce sont les bronches. - A la grande veine. Peut-être est-ce la veine que l'anatomie moderne appelle encore la grande veine azygos, ou peut-être aussi la veine cave, qui est très forte et qui suit la colonne vertébrale, dans une bonne partie de son trajet. D'ailleurs, Aristote ne connaît pas la différence des veines et des artères, qui n'a été faite que longtemps après lui. - Quand on souffle dans la trachée-artère. Cette expérience a été répétée depuis lors bien des fois. - Des cellules cartilagineuses qui se réunissent en pointe. Toute cette description de l'épanouissement des bronches dans le poumon est exacte, du moins dans ses lignes les plus générales. Devant ces détails, il est impossible de douter qu'Aristote ait disséqué plus d'un cadavre.

§ 11. Il est creux. Il s'agit sans doute ici des cavités du ventricule gauche. - Si l'on souffle dans l'artère... II ne paraît pas que ceci soit aussi exact que l'expérience indiquée un peu plus haut. Pour que le vent pût passer de la trachée-artère dans le cœur, il faudrait qu'il déchirât une foule de membranes de tout genre qui s'y opposent; mais il n'est pas impossible qu'en soufflant très violemment, on ne les brise; et c'est sans doute ce qui se sera produit dans les expériences faites par Aristote. - Chez quelques animaux. Ainsi les expériences ne s'étaient pas bornées à l'organisation humaine, et elles avaient porté aussi sur d'autres animaux. Il se peut que sur quelques-uns, moins bien organisés, elles aient paru réussir.

§ 12. Telle est donc la fonction. C'est bien en effet la trachée-artère qui seule apporte l'air du dehors, pour le distribuer, par les bronches et leurs ramifications, dans toutes les parties du poumon. - En toussant. J'ai dû ajouter ces mots, pour rendre toute la force de l'expression grecque.

§ 13. L'œsophage est rattaché par en haut. L'œsophage s'étend du pharynx à l'estomac proprement dit. Le mot du texte qu'il faut traduire ici par œsophage est celui même qui nous a donné notre mot d'estomac; et cette étymologie montre le rapport de l'œsophage à la bouche. - Soudé. L'expression grecque est peut-être un peu moins forte. - Il finit à l'estomac. Ici le mot du texte traduit par estomac signifie proprement le ventre; mais l'anatomie démontre qu'il s'agit bien de l'estomac, et non pas encore de l'abdomen. - De nature charnue. L'œsophage est plutôt musculeux et membraneux. - II est tendu. S'il n'était que de la chair comme le dit Aristote, cette tension indispensable ne serait pas possible. - Sa longueur et sa largeur. Selon les sujets, la longueur de l'œsophage peut être de 22 à 25 centimètres, dont la plus grande partie est au-dessus du diaphragme, et sa largeur est en général de 25 millimètres à peu près.

§ 14. Ressemble à celui du chien. Ceci est déjà de l'anatomie comparée; mais la ressemblance n'est pas frappante entre l'estomac de l'homme et l'estomac du chien. - Pas beaucoup plus grand que l'intestin. Ceci n'est pas très exact; et l'estomac de l'homme est beaucoup plus gros que le reste du tube intestinal. - L'intestin simple, qui est enroulé. J'ai adopté ici le texte de MM. Aubert et Wimmer, qui supprime une répétition peu utile. - L'estomac inférieur. Le texte emploie ici le même mot qui a dû être traduit plus haut par estomac; ma traduction a dû le répéter aussi; mais on voit qu'Aristote confond presque complètement l'estomac et le reste de l'intestin. - A celui du porc. Même remarque que pour le rapprochement avec l'estomac et l'intestin du chien. - Qui va de l'estomac au siège. C'est sans doute la partie de l'intestin que nous appelons le gros intestin, qui est, en effet, épais et court, comparé au reste, et qui se compose du caecum, du côlon et du rectum. Le siège est évidemment le derrière et l'anus.

§ 15. L'épiploon est suspendu... Cette description est en général assez exacte; mais l'analyse ne semble pas poussée assez loin. L'épiploon, ou plutôt les épiploons, puisque l'anatomie actuelle en distingue trois, sont des replis du péritoine. Le péritoine est la membrane séreuse qui tapisse toutes les parois de l'abdomen, et qui en enveloppe presque tous les organes; les replis que forme le péritoine et qui semblent flotter à la surface de quelques-uns de ces organes, sont les épiploons; c'est même de cette disposition que leur vient leur nom. Il y a le grand épiploon, l'épiploon gastro-hépatique, et l'épiploon gastro-splénique. Le second est appelé aussi le petit épiploon. L'épiploon dont parle ici Aristote semble être le grand épiploon; il va de la courbure de l'estomac à l'arc du côlon. - Une membrane graisseuse. C'est bien là en effet la nature de l'épiploon. - Qui ont les deux rangées de dents. C'est une classification que la science moderne n'a pas conservée, mais qui joue un grand rôle dans l'œuvre d'Aristote.

§ 16. Sur les intestins est le mésentère. On peut dire du mésentère à peu près ce qu'on vient de dire de l'épiploon ; il y a plusieurs mésentères, qui sont aussi des replis du péritoine, et qui vont des parois abdominales à un organe pour y porter des vaisseaux et des nerfs. On distingue le mésentère proprement dit, le plus vaste de ces replis et celui dont sans doute Aristote veut parler, les mésocolons, ascendant et descendant, le mésocôlon transverse, le mésocôlon iliaque, et le mésorectum, et enfin le repli péritonéal, qui relie la rate à la paroi postérieure de l'abdomen. Ici non plus, l'analyse anatomique d'Aristote n'est pas poussée assez loin. - Membraneux, large et gras. Ces caractères sont assez exacts en effet. - De la grande veine. Sans doute, la veine cave ; voir plus haut, § 10. - Et de l'aorte. Ces descriptions ne sont plus exactes; mais il n'y a pas lieu de s'en étonner, dans des observations si minutieuses et si difficiles. - Sillonné de veines nombreuses. Ceci s'applique sans doute à d'autres organes que les mésentères; mais ces détails attestent de nouveau, tout erronés qu'ils sont, qu'Aristote avait poussé la dissection assez loin. - Jusqu'en bas. Les replis du péritoine tapinent en effet toute la cavité thoracique.

§ 17. Telle est donc.  Résumé qui ne concerne que certains organes intérieurs de l'homme, puisque dans le chapitre suivant, il sera question du cœur et de quelques autres organes.

CHAPITRE XIV. Du cœur dans le corps humain ; ses cavités ; sa position ; sa pointe toujours dirigée en avant ; méprises dans la dissection; le cœur est placé à gauche; description des trois cavités; communication du cœur avec le poumon ; expérience qui prouve cette communication ; le poumon est de tous les organes celui qui a le plus de sang; mais ce sang est dans les veines qui le traversent, tandis que le cœur a le sang en lui-même ; différence du sang selon les cavités ; description du diaphragme ; le foie, la rate, l'épiploon; le foie n'a pas de fiel ; singularité des moutons de l'Eubée et de ceux de Naxos ; description des reins, ou rognons, dans l'homme ; leur organisation; vaisseaux qui se rendent des reins à la vessie; description de la vessie; organe sexuel chez l'homme; testicules; la seule différence chez la femme consiste dans la matrice ; dessins anatomiques à consulter, annonce de travaux ultérieurs.

§ 1. Le cœur a trois cavités; il est placé plus haut [5] que le poumon, à la bifurcation de la trachée- artère; il a une membrane grasse et épaisse, là où il se rattache à la grande veine et à l'aorte ; il repose sur l'aorte ; et sa pointe est tournée vers la poitrine, comme dans tous les animaux qui ont une poitrine ; [10] car dans tous les animaux, qu'ils aient ou qu'ils n'aient pas cet organe, la pointe du cœur est toujours dirigée en avant; mais on peut souvent s'y tromper, parce qu'elle s'affaisse dans la dissection. La convexité du cœur est en haut; ordinairement la pointe est charnue et épaisse; et il y a des muscles dans ses cavités.

§ 2. Dans tous les autres animaux qui ont une poitrine, la position du cœur [15] est au milieu de cet organe ; chez l'homme, il est plus à gauche, à peu de distance de la ligne qui divise les mamelles, incliné vers la mamelle gauche, dans le haut de la poitrine. Le cœur de l'homme n'est pas grand; dans sa totalité, il n'est pas allongé; il serait plutôt arrondi, si ce n'est que son extrémité se termine en pointe.

§ 3. Comme nous venons de le dire, il a trois [20] cavités; la plus grande est à droite; la plus petite est à gauche; et la cavité de grandeur moyenne est dans le milieu. Toutes ces cavités, y compris les deux plus petites sont en communication avec le poumon; c'est ce que l'insufflation démontre clairement pour une des cavités d'en bas.

§ 4. [25] Par sa plus grande cavité, le cœur se rattache à la grande veine, près de laquelle est aussi le mésentère ; et par sa cavité moyenne, il se rattache à l'aorte.

§ 5. Des canaux vont du cœur au poumon; et ces canaux se ramifient, comme la trachée-artère, accompagnant ceux qui viennent de la trachée, dans toute l'étendue [30] du poumon. Les canaux partant du cœur occupent le dessus; entre la trachée et le cœur, pas un seul de ces vaisseaux n'est commun; mais par la connexion, ils reçoivent l'air, et ils l'envoient jusqu'au cœur. L'un de ces canaux se rend à la cavité droite; et l'autre, à la cavité gauche.

§ 6.  Plus loin, nous nous occuperons de la grande veine et de l'aorte, [497a] prises chacune à part; et nous les étudierons aussi toutes les deux à la fois, dans ce qu'elles ont de commun.

§ 7. C'est le poumon qui a le plus de sang de tous les organes, dans les animaux qui ont un poumon, et qui sont vivipares, soit en eux-mêmes, soit au dehors. Dans sa masse entière, le poumon est spongieux; et les vaisseaux de la grande veine accompagnent chaque bronche. Mais ceux qui croient [5] que le poumon est vide de sang ont été trompés, en ne regardant que les poumons enlevés aux animaux d'où le sang s'était échappé en totalité, aussitôt qu'ils avaient été découpés.

§ 8. Entre tous les viscères, le cœur est le seul à avoir du sang ; car le poumon n'en a pas précisément en lui-même; il n'en a que dans les veines qui le traversent. Au contraire le cœur a du sang en lui-même, puisqu'il en a dans chacune de ses cavités. Le sang le plus léger [10] est dans la cavité du milieu.

§ 9. Au-dessous du poumon, est la ceinture du tronc, et ce qu'on appelle les reins, qui tiennent aux côtes, aux hypocondres et à l'épine dorsale. Dans son milieu, le diaphragme est mince et membraneux. II est traversé de part en part de veines, qui, dans le corps de l'homme, [15] sont très fortes en proportion de sa taille.

§ 10. Sous le diaphragme, à droite est le foie ; à gauche, est la rate. La position de ces organes est toujours la même dans tous les animaux qui en sont pourvus, quand ils sont conformés d'une manière naturelle et qu'ils ne présentent pas de monstruosité; car on a déjà vu quelquefois des quadrupèdes où ces organes étaient dans une position absolument inverse. Le foie et la rate se rattachent [20] au bas de l'estomac par l'épiploon.

§ 11. A la voir, la rate de l'homme est étroite et longue comme celle du porc. Ordinairement et dans presque tous les animaux, le foie est sans bile, sans fiel; dans quelques-uns, il y en a, le foie de l'homme étant d'ailleurs arrondi et pareil à celui du bœuf. Cette absence de fiel peut se remarquer [25] sur les victimes, de même que, dans une région aux environs de Chalcis en Eubée, les moutons n'ont pas de fiel. Au contraire, à Naxos, la plupart des quadrupèdes ont une si grande quantité de fiel que les étrangers qui y font des sacrifices en sont tout effrayés, croyant que c'est un présage qui leur est personnel, et ne sachant pas que c'est la nature particulière de ces bêtes.

§ 12. Le foie se rejoint à la grande [30] veine ; mais il ne communique pas avec l'aorte; car la veine qui sort de la grande veine traverse le foie tout entier, au point où sont ce qu'on appelle les portes du foie. La rate ne se rattache absolument qu'à la grande veine ; car une veine partant de celle-là vient dans la rate.

§ 13. Après ces organes viennent les reins, ou rognons, qui sont situés près de la colonne dorsale directement, et qui ressemblent beaucoup, dans leur nature, à ceux du bœuf. Dans tous les animaux qui ont des rognons, le droit est toujours plus élevé [497b] que le gauche; il a moins de graisse, et il est plus sec. Cette conformation est dans tous les autres animaux semblable à ce qu'elle est chez l'homme. Des vaisseaux, partant de la grande [5] veine et de l'aorte, se rendent dans les reins, mais non dans leur cavité; car les reins ont une cavité dans leur centre, plus grande chez les uns, plus petite chez les autres, excepté pourtant chez le phoque, qui a les reins pareils à ceux du bœuf, et les plus compacts de tous.

§ 14. Les vaisseaux qui se rendent dans les reins se perdent dans le corps des reins mêmes; et la preuve qu'ils [10] ne les traversent pas, c'est que les reins n'ont pas de sang, et que le sang ne s'y coagule jamais.

§ 15. Les reins ont, ainsi qu'on vient de le dire, une petite cavité; et de cette partie creuse des reins, deux canaux assez petits se rendent dans la vessie, ainsi que d'autres canaux très forts et parallèles, qui partent de l'aorte. Du milieu de chacun des deux reins, une veine grosse et musculeuse part [15] pour se diriger le long du rachis même, en passant par un espace très étroit. Ensuite, ces deux veines disparaissent dans chacune des hanches et reparaissent de nouveau, s'étendant sur la hanche.

§ 16. Ces divisions des veines descendent dans la vessie ; car la vessie est placée tout à fait la dernière. Elle est suspendue aux canaux qui se dirigent des reins le long [20] de la tige qui se rend à l'urètre. La vessie est presque tout entière enveloppée, dans sa rondeur, de petites membranes légères et fibreuses, qui se rapprochent, on peut dire, de l'organisation du diaphragme du thorax. La vessie dans l'homme est d'une médiocre grandeur.

§ 17. Auprès du col de la vessie, [25] s'attache le membre honteux, qui est nerveux et cartilagineux. L'orifice le plus extérieur s'ouvre dans le membre même. Un peu plus bas, l'un des conduits se rend aux testicules; l'autre, à la vessie. De ce membre, pendent les testicules chez les mâles nous dirons plus loin quelle en est l'organisation, quand nous traiterons des organes communs [30] aux différentes espèces.

§ 18. Dans la femme, tout est naturellement pareil à ce qu'on voit dans l'homme; la seule différence consiste dans la matrice. On peut voir quelle en est la forme apparente d'après le dessin qui est dans les ouvrages d'Anatomie. La position de la matrice est dans les intestins; et la vessie est placée derrière la matrice.

§ 19. Nous aurons encore, dans ce qui va suivre, à parler des matrices des animaux en général ; [35] les matrices ne sont pas les mêmes dans tous, et elles ne sont pas disposées de même. [498a] Mais en ce qui concerne les parties intérieures et extérieures du corps de l'homme, on vient de voir ce qu'elles sont, comment elles sont, et quelle en est l'organisation.  

§ 1. Le cœur a trois cavités. Voir plus loin § 3, et liv. III, ch. III. Il est difficile de comprendre comment Aristote a pu trouver trois cavités dans le cœur. Ou d'une manière générale, on peut considérer le cœur comme une grande cavité; ou si l'on pénètre plus attentivement dans l'intérieur, on y trouve quatre cavités et non trois, les deux oreillettes et les deux ventricules à droite et à gauche. Le nombre trois ne se rapporte pas davantage aux gros vaisseaux qui entrent dans le cœur ou qui en sortent : la veine cave supérieure, l'aorte, l'artère pulmonaire, le tronc brachio-céphalique, la veine pulmonaire, etc., etc. - Placé plus haut que le poumon. Ceci ne doit pas être pris à la lettre; et, dans son ensemble, le cœur est plutôt placé au-dessous du poumon; seulement, le poumon à droite et à gauche descend un peu plus bas que la pointe du cœur sur le diaphragme; et c'est ainsi qu'il faut comprendre la description d'Aristote. Peut-être aussi pourrait-on traduire, en ne pensant qu'à la partie supérieure du cœur. « Placé dans la portion la plus haute du poumon ». Mais le texte serait peu correct pour exprimer ce sens. Les manuscrits ne donnent pas de variantes. - A la bifurcation de la trachée-artère. C'est bien là en effet la place où est le sommet du cœur. - Une membrane grasse et épaisse. C'est sans doute le péricarde, ou aussi le tissu même du cœur, qui est en effet épais et graisseux. - A la grande veine. La veine cave supérieure. - Et à l'aorte. En fait, l'aorte naît dans la partie gauche du cœur, et dans l'oreillette gauche. - Il repose sur l'aorte. C'est-à-dire qu'après être sortie du cœur, l'aorte, s'infléchissant en forme de crosse, passe derrière le cœur, descend le long de la colonne vertébrale, et traverse le diaphragme pour donner naissance à toutes les artères inférieures du corps, jusqu'à l'extrémité des jambes et des pieds. - Vers la poitrine. Vers la partie antérieure, par conséquent. - Dirigée en avant. Et un peu vers la gauche, comme il sera dit au paragraphe suivant. - Dans la dissection. Le mot grec n'est peut-être pas aussi technique ; il signifie seulement division, partage ; mais ici il s'agit de la division qu'on fait tout exprès de certaines parties du corps, qu'on veut observer. - Il y a des muscles dans ses cavités. C'est ce qui a fait dire aux anatomistes modernes que le cœur est « un muscle creux ». Le mot du texte signifie nerfs aussi bien que muscles; mais j'ai préféré ce dernier mot, parce que, ainsi que je l'ai dit, la distinction des nerfs et des muscles n'a pas été connue d'Aristote. L'intérieur du cœur est composé des matières les plus diverses pour la prodigieuse organisation des oreillettes et des ventricules; mais la science au début a nécessairement tout confondu, dans l'impuissance de pousser plus loin l'analyse.

§ 2. Dans le haut de la poitrine. Il faut comprendre ici par poitrine toute la cavité thoracique; et alors le cœur se trouve placé en effet dans la partie supérieure. - Le cœur de l'homme... en pointe. MM. Aubert et. Wimmer proposent de rejeter tout ce passage, parce qu'une des expressions qui y figurent est peu régulière, et ensuite parce qu'il y a une répétition sur la terminaison du cœur en pointe. Ces raisons ne sont pas décisives; et devant l'unanimité des manuscrits, il faut conserver tout ce passage, bien que les critiques dont il est l'objet puissent être justes. - II serait plutôt arrondi. Il suffit de regarder un cœur mis à nu, pour se convaincre de l'exactitude de cette description.

§ 3. Il a trois cavités. Voir plus haut. Il faut qu’Aristote ait confondu les deux oreillettes en une seule, ou peut-être les deux ventricules; ce qui est moins probable. - La plus grande est à droite. C'est sans doute l'oreillette droite. - La plus petite est à gauche. Sans doute, l'oreillette gauche, qui ne paraît pas en général moins grande que l'oreillette droite. - La cavité de grandeur moyenne. Est-ce la confusion des deux ventricules? - Les deux plus petites. Sans doute, une des oreillettes et les deux ventricules réunis. - En communication avec le poumon. Ceci est exact, et Aristote paraît s'en être convaincu par l'insufflation. C'est la première indication de la circulation pulmonaire, à côté da la grande circulation; mais il fallait près de deux mille ans encore pour que la science s'expliquât le phénomène entier de la circulation du sang, dans le corps et dans les poumons. - Pour une des cavités d'en bas. Il paraît bien qu'il s'agit ici du ventricule droit, qui reçoit le sang veineux de l'oreillette droite et qui le chasse dans les poumons par l'artère pulmonaire; le sang, rendu artériel par le contact avec l'air dans les poumons, revient à l'oreillette gauche qui le renvoie au ventricule gauche; et ce dernier ventricule le chasse à son tour par l'aorte dans le corps entier. Du reste, le mot que j'ai rendu par Insufflation peut signifier simplement aussi adhérence. J'ai préféré l'autre.

§ 4. Par sa plus grande cavité. L'oreillette droite. - A la grande veine. Sans doute, la veine cave supérieure, ou peut-être aussi la veine cave inférieure. - Près de laquelle est aussi le mésentère. MM. Aubert et Wimmer repoussent ce membre de phrase; et l'on ne voit pas bien en effet comment le mésentère vient figurer ici. C'est le plus grand repli du péritoine; il est étendu en avant de la colonne vertébrale; et sa largeur varie, depuis son insertion jusqu'à son attache intestinale. - Par sa cavité moyenne. Il semble bien qu'Aristote veut désigner par là l'oreillette gauche, puisque c'est de cette oreillette que sort l'aorte. MM. Aubert et Wimmer croient au contraire qu'il est question du ventricule droit. Mais dans l'organisation si compliquée du cœur, il n'est pas étonnant que les premiers observateurs n'aient pas su se reconnaître. La circulation du sang ne devait être connue que bien longtemps plus tard.

§ 5. Des canaux vont du cœur au poumon. Ce sont les artères et les veines pulmonaires, portant le sang du ventricule droit aux poumons, l'y répandant jusque dans les dernières cellules, et le ramenant à l'oreillette et au ventricule gauches, pour le lancer ensuite par l'aorte dans toutes les parties du corps supérieures et inférieures. - Se ramifient comme la trachée-artère. Ceci est assez exact; mais ce sont plutôt les bronches qu'il faudrait dire. - Ceux qui viennent de la trachée. Ce sont toutes les ramifications des bronches, dans l'un et l'autre poumon. - Occupent le dessus. Ceci n'est pas faux ; mais ce n'est pas non plus très exact, puisque l'aorte est tantôt par-dessus et tantôt par-dessous les bronches.  - Entre la trachée et le cœur. J'ai ajouté ceci, comme l'ont fait MM. Aubert et Wimmer, pour que la pensée fût plus claire; c'est un complément presque nécessaire de ce qui suit, puisque les vaisseaux dont le texte parle ne peuvent être communs qu'entre le cœur et la trachée-artère. - Et ils l'envoient jusqu'au cœur. Ceci est tout à fait inexact; et l'air ne va pas plus loin que les poumons. - L'un de ces canaux. Ceci encore est faux; mais pour être complètement exact sur tous ces points, il aurait fallu connaître la circulation pulmonaire outre la grande articulation; et si quelque chose doit nous étonner ici, c'est qu'Aristote en ait déjà tant su. Il est d'ailleurs difficile de comprendre à quels vaisseaux se rapportent réellement les deux canaux dont il parle ici.

§ 6. Plus loin. Liv. III, ch. III §§ 5 et suivants, où Aristote revient plus longuement sur tous ces détails.

§ 7. Qui a le plus de sang. Celte généralité est vraie, quoiqu'Aristote ne pût pas se rendre compte de l'hématose proprement dite. C'est le poumon qui fait le sang, en le renouvelant sans cesse de façon à le vivifier et à le rendre nutritif; voir le § suivant. - Soit en eux-mêmes, soit au dehors. Celte distinction, qui n'est pas fausse, n'a pas été conservée par la science, qui a pris d'autres bases de classification, plus claires que celle-là. - Est spongieux. La simple vue suffit à montrer que c'est bien la nature du poumon; ses cellules en font une sorte d'éponge. - Les vaisseaux de la grande veine. Ceci n'est pas exact, si, par la grande veine, on entend la veine cave; mais il est certain d'un autre côté que les ramifications de l'artère et des veines pulmonaires suivent celles des bronches. - Ceux qui croient. Il y avait déjà en effet des dissensions sur toutes ces questions de physiologie et d'anatomie; et Aristote y fait souvent allusion dans ses ouvrages d'histoire naturelle. - Aussitôt qu'ils avaient été découpés. J'ai pris un terme général, parce qu'il peut s'agir des animaux découpés après les sacrifices, aussi bien que de dissections anatomiques.

§ 8. Le seul à avoir du sang. Ceci est fort exact, avec l'explication qu'en donne Aristote; il voit bien que le cœur est le centre du système sanguin. Ce n'est pas précisément le cœur qui fait le sang; mais il le reçoit et le renvoie. - Dans les veines qui le traversent, et qui lui viennent du cœur. - Dans chacune de ses cavités. Ces cavités sont les deux oreillettes, l'une à droite, l'autre à gauche, et les deux ventricules placés au-dessous et de même. Mais pour Aristote, le cœur n'a que trois cavités, comme il l'a dit plus haut, § 1. - Le plus léger. On pourrait croire que ceci se rapporte à la distinction, dans le cœur, du sang artériel et du sang veineux. La cavité du milieu étant très probablement pour Aristote l'oreillette gauche ou le ventricule gauche, le sang qu'il appelle le plus léger est celui qui revient du poumon au cœur. MM. Aubert et Wimmer paraissent croire au contraire que c'est le sang du ventricule droit. Voir plus haut § 4 et la note.

§ 9. La ceinture du tronc. C'est le diaphragme; mais j'ai tenu à traduire littéralement le mot du texte. - Et ce qu'on appelle les reins. II y a des manuscrits qui disent : « les veines » ; ce qui ne se comprendrait pas. Cette équivoque vient de ce que les deux mots se ressemblent beaucoup en grec. - Le diaphragme. J'ai mis ici le mot propre, bien qu'il ne soit pas exprimé dans le texte. - Traversé de part en part de veines. J'ai reproduit le terme général de veines qu'emploie le texte; mais ce ne sont pas précisément des veines qui traversent le diaphragme. C'est d'abord l'œsophage, qui doit aller à l'estomac; c'est ensuite l'aorte, qui doit se ramifier à toutes les parties inférieures du corps, pour lui fournir des artères jusqu'à l'extrémité des pieds; et c'est la veine cave ascendante, sans compter d'autres vaisseaux de moindre importance, le canal thoracique, la veine azygos, etc. - Qui dans le corps de l'homme. Je fais rapporter ceci aux vaisseaux qui traversent le diaphragme; mais on pourrait donner plus de généralité à ce passage, et croire qu'il s'agit de toutes les veines de notre corps, au lieu des vaisseaux particuliers qui traversent le diaphragme. Ce dernier sens, plus restreint, me semble préférable.

§ 10. Sous le diaphragme. Ces positions du foie et de la rate sont exactes. - Ces organes étaient dans une position absolument inverse. Le fait n'est peut-être pas impossible, et les monstruosités expliquent tout; mais l'auteur aurait dû citer ici des observations qu'il aurait pu appuyer de son témoignage personnel. - Le foie et la rate. Le texte est moins précis; il n'a qu'un verbe, qui peut se rapporter également, ou aux deux viscères qui viennent d'être nommés, ou à un seul. MM. Aubert et Wimmer ont adopté ce dernier sens, sans dire s'il s'agit du foie ou de la rate. Le foie est situé dans l'hypocondre droit, qui en est rempli; et il y est tenu par des replis du péritoine, par un ligament appelé suspenseur du foie, et par l'épiploon gastro-hépatique. La face inférieure gauche du foie est en rapport avec l'estomac et sa grosse tubérosité. La rate située dans l'hypocondre gauche est fixée à l'estomac par l'épiploon gastro-splénique. On ne sait pas bien encore quelles sont ses fonctions.

§ 11. Etroite et longue. MM. Aubert et Wimmer trouvent cette description fort inexacte; car ils en concluent qu'Aristote n'avait jamais vu de rate humaine. La rate a à peu près le tiers du foie. - Comme celle du porc. II semble que cette comparaison, d'ailleurs plus ou moins juste, implique qu'Aristote avait observé et vu la rate de l'homme. - Est sans bile, sans fiel. Le texte na qu'un seul mot; j'ai ajouté le second, parce que l'expression grecque peut présenter les deux sens. Le foie sécrète la bile, et c'est là sa fonction principale, si ce n'est unique. II semble donc assez difficile de comprendre ce qu'Aristote veut dire ici. Peut-être veut-il parler uniquement de la vésicule du fiel, comme la suite le prouve. - Le foie de l'homme étant d'ailleurs arrondi. Le foie a une forme très irrégulière, et on ne saurait dire très précisément quelle elle est. Les anatomistes remarquent en outre que le foie est très sujet à se déformer. Considéré dans son ensemble, sous l'enveloppe que lui fait le péritoine, il peut sembler quelque peu arrondi. - Pareil à celui du bœuf. Sans doute, on voyait alors plus de foies de bœuf que de foies d'homme. - Cette absence de fiel. Le texte n'a qu'un pronom neutre tout à fait indéterminé. - Sur les victimes. Ou bien, « dans les sacrifices ». - En Eubée... à Naxos. L'Eubée, aujourd'hui Négrepont, la plus grande île de la mer Egée, au nord de l'Attique. C'est là, à ce qu'on croit, qu'Aristote est allé mourir. Naxos est la principale des Cyclades. II serait curieux de vérifier les faits énoncée dans ce passage. S'ils sont exacts, ils n'ont pas dû changer depuis le temps d'Aristote.

§ 12. Se rejoint à la grande veine. C'est sans doute par la veine porte, dans le sillon transverse du foie; ses ramifications se rendent dans la veine cave ou grande veine. - Il ne communique pas avec l'aorte. L'artère hépatique, qui part du tronc cœliaque et qui se jette dans le foie, établit une communication avec l'aorte ; mais son calibre est si petit qu'Aristote a bien pu ne pas la reconnaître.  - La veine qui sort de la grande veine. Ce sont peut-être les veines hépatiques; elles reportent dans la veine cave le sang de la veine porte, qui a servi à la sécrétion de la bile. - Les portes du foie. Les anatomistes modernes n'ont rien conservé de cette description. - Ne se rattache absolument qu'à la grande veine. L'artère splénique est très volumineuse, et elle pénètre profondément dans la rate. La veine splénique n'est pas moins considérable; c'est un des principaux affluents de la veine porte. - Une veine partant de celle-là. Ce serait peut-être plutôt le contraire qu'il faudrait dire. C'est la veine dite splénique, qui remplit la rate de ses divisions.

§ 13. Les reins, ou rognons. Il n'y a qu'un seul mot dans le texte. Il aurait fallu ajouter : les  « deux » reins. Mais sans doute le fait aura paru si évident qu'il était inutile de le mentionner. - De la colonne dorsale directement. Le texte dit mot à mot : « de la colonne dorsale elle-même ». - A ceux du bœuf. Quelques commentateurs en ont conclu qu'Aristote n'avait pas observé les reins de l'homme; il semble qu'il faut en conclure tout le contraire ; car autrement la comparaison n'aurait pas été possible. - Qui ont des rognons. Notre mot de rognons s'applique aux animaux plutôt que celui de reins, réservé plus particulièrement à l'homme. - Le droit est toujours plus élevé. II semble que ce soit le contraire chez l'homme, où le rein droit est en général plus bas que le gauche. - Il a moins de graisse. Chacun des deux reins est enveloppé dans un tissu cellulo-graisseux; cette disposition fait que le rein reste immobile. - Semblable à ce quelle est chez l'homme. Ceci prouve que l'auteur avait fait des observations sur le corps humain. - De la grande veine et de l'aorte. L'artère rénale, qui est fort grosse, part de l'aorte, et se ramifie, dans le rein, en une foule de vaisseaux de plus en plus petits. Quant à la veine rénale, elle n'est guère moins volumineuse, et elle se rend du rein dans la veine cave, c'est-à-dire, la grande veine selon Aristote. Les divisions de la veine rénale sont aussi très nombreuses. - Une cavité dans leur centre. C'est ce que l'anatomie actuelle appelle le bassinet, ou peut-être le hile entier du rein. - Chez le phoque. On pourrait croire que ceci est une interpolation, puisque, dans ce passage, il n'est question que des reins de l'homme.

§ 14. Ils ne les traversent pas. Ceci est exact l'artère vient dans le rein; la veine en part; mais ni l'artère ni la veine ne le traversent. - Ne s'y coagule jamais. Ceci n'est pas très clair; mais le texte ne peut pas donner un autre sens.

§ 15. Ainsi qu'on vient de le dire. Ceci excuse la répétition, que MM. Aubert et Wimmer paraissent condamner, en mettant ce membre de phrase entre crochets. - Deux canaux assez petits. Ce sont les uretères, un pour chaque rein, qui conduisent l'urine sécrétée, du bassinet à la vessie. - D'autres canaux très forts. Il semble qu'il s'agit ici des artères iliaques primitives, qui partent en effet de l'aorte abdominale; mais elles ne vont pas à la vessie; elles passent à droite et à gauche, pour se ramifier dans les cuisses et les jambes. - Et parallèles. Ou plus exactement peut-être : « continus ». Des traducteurs ont compris que cette continuité signifiait que ces vaisseaux ne se ramifient pas. - Une veine grosse et musculeuse. Ce ne sont pas les artères rénales qui vont de l'aorte au milieu de chaque rein, mais qui ne suivent pas le rachis ; ce sont plutôt les urètres. L' « espace étroit  » est sans doute celui qui reste entre les reins et l'aorte, et où passent les uretères. - Ensuite ces deux veines. Il est probable qu'il s'agit ici des artères rénales, et des artères iliaques primitives, qui deviennent, un peu plus bas, des artères fémorales; mais la description d'Aristote ne paraît pas très exacte; et l'anatomie qu'elle suppose n'est pas très avancée. II est difficile de retrouver sur le cadavre les dispositions des artères ou des veines dont il peut être question ici, et qui « disparaissent dans les hanches ».

§ 16. Ces divisions des veines. II ne peut s'agir que des uretères, qui conduisent l'urine des reins à la vessie, sur une assez grande longueur, entre deux et trois décimètres. Un uretère part de chacun des reins. - La dernière. C'est-à-dire « à l'extrémité des uretères » ; au-dessous de la vessie, il y a tout l'appareil excrétoire, destiné à l'expulsion de l'urine. La vessie est située dans la cavité du petit bassin. — Elle est suspendue aux canaux. Ou « retenue par les canaux ». Ici encore la description que donne Aristote est assez obscure; mais ces organes sont tellement compliqués que ces erreurs, au début de la science, se comprennent de reste et sont très excusables. - Le long de la tige. C'est la traduction fidèle du texte; mais « la tige qui se rend à l'urètre » ne peut être que l'urètre. L'urètre commence au col de la vessie et en bas, et à partir de la symphyse du pubis; sa direction est la même que celle de la verge, et il se termine avec elle, pour l'expulsion de l'urine et de la liqueur spermatique. - De petites membranes légères et fibreuses. La vessie a trois tuniques distinctes, séreuse, musculeuse et muqueuse, qui viennent en partie du péritoine, du pubis, de la prostate, des uretères et de l'urètre. - Du thorax. Cette similitude du diaphragme et de la vessie n'est pas frappante; et l'on doit douter que la science actuelle puisse l'approuver.

§ 17. Auprès du col de la vessie. Ce n'est pas faux; mais ce n'est pas tout à fait exact; la verge est située en avant du pubis. La vessie est située plus profondément. - Le membre honteux. C'est la traduction littérale du mot grec; dans notre langue, le mot technique est la verge. - Nerveux et cartilagineux. C'est exact, quoique, vague. La verge se constitue des corps caverneux, du canal de l'urètre, de vaisseaux, de nerfs et de muscles propres ; le tout est entouré d'enveloppes spéciales, au nombre de quatre. - L'orifice le plus extérieur. C'est le canal de l'urètre. - L'un des conduits. Cette description peut sembler insuffisante; mais l'anatomie de ces parties est si délicate et si compliquée qu'il n'y a point à s'étonner de ces nouvelles erreurs. II est probable qu'Aristote veut parler du canal éjaculateur. Dans la plupart des éditions, les mots de « nerveux et cartilagineux » se trouvent placés ici, au lieu de l'être un peu plus haut. C'est Schneider qui les a déplacés, et j'ai suivi sa leçon, que MM. Aubert et Wimmer semblent adopter aussi. - Plus loin, voir liv. III, ch. 1.

§ 18. Tout est naturellement pareil... Cette généralité n'est pas très exacte. II y a bien des différences intérieures entre les deux sexes; au dehors, il n'y a en effet de différence qu'entre la verge et la matrice, pour prendre l'expression d'Aristote. Mais les organes génitaux de la femme se composent de parties nombreuses que l'homme n'a pas : les ovaires, les trompes de Fallope, l'utérus, le vagin, la vulve. etc. - D'après le dessin. On voit par là, comme je l'ai déjà fait remarquer, que l'idée de l'Illustration n'est pas nouvelle, et que les Anciens nous avaient dès longtemps devancés dans cet ingénieux moyen de faire mieux comprendre les choses qu'on décrit. Voir liv. III, ch. I, § 14. - Est dans les intestins ou : « dans les parties intérieures ». - Derrière la matrice. Ceci est exact si l'on entend par matrice, comme le fait Aristote et comme on peut le faire avec lui, la vulve, ou l'ensemble des parties génitales de la femme, vues du dehors.

§ 19. Dans ce qui va suivre. Voir plus loin, liv. III, ch. I, § 2, et même liv. III, ch. 3 et 4. - Du corps de l'homme. C'est par la description de l'homme qu'Aristote a voulu commencer l'histoire des animaux; et il en a donné les plus fortes raisons; plus haut, ch. vi, § 12. On ne saurait trop admirer l'ordonnance générale de ce premier livre, digne introduction à l'ouvrage entier. Voir plus haut la note du ch. VI, § 12; voir aussi la Préface, et l'analyse, qui y est donnée assez longuement, de ce premier livre, rapproché du premier livre du Traité des Parties.  

FIN DU LIVRE PREMIER.